Bibi-la-Bibiste

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The Little Review de septembre-décembre 19207 (p. 3-8).

à Francis Poulenc


Bibi-la-Bibiste[1]

(Roman)


par les

Sœurs X…


Que celui d’entre vous qui est sans péché
lui jette le première pierre. — (Jean — viii, 7)


chapitre premier

Enfance


Sa naissance fut semblable à celle des autres enfants.

C’est pourquoi on la nomma Bibi-la-Bibiste.


(Ceci fut l’enfance de Bibi-la-Bibiste)


chapitre deuxième

Adolescence


Le sang rouge coulait dans ses artères ; le sang noir coulait dans ses veines[2].


(Telle fut l’adolescence de Bibi-la-Bibiste.)


chapitre troisième

Amour


À seize ans, elle travaillait dans un atelier.

— Aïe ! mon nez me démange ! s’écria-t-elle.

— C’est un vieux qui t’aime, répondirent ses compagnes, interrompant leur chanson.

Une violente émotion la saisit. Son cœur fit volte-face dans sa poitrine.


(Telles furent les amours de Bibi-la-Bibiste.)


chapitre quatrième

Déception


Elle sortit.

Dans la rue populeuse, les vieux messieurs passaient, nombreux. Bibi-la-Bibiste les examinait de son regard anxieux. Mais aucun ne répondit à son appel. Un seul lui lança un coup d’œil enflammé, et il était jeune !

Ne voulant pas s’opposer aux desseins mystérieux de la Fatalité[3], Bibi-la-Bibiste poursuivit son chemin.


(Et ceci fut la déception de Bibi-la-Bibiste.)


chapitre cinquième

Rideau


Dans un lit d’hôpital s’éteignit Bibi-la-Bibiste. Comme Marie sa patronne, comme Jehanne d’Arc, elle était vierge. Mais sa fiche portait la mention « Syphilitique ».

Ô puissance magique d’un regard amoureux !


(Et ceci est le dernier et le plus tragique chapitre du roman de Bibi-la-Bibiste.)


  1. The author (infant of I should think about eighteen, at any rate can’t be over twenty) has managed to satirize french religious instruction, french scientific instruction, Brieux and three schools of modern art with remarkable economy of means. The book is a chef d’œuvre,— it has all the virtues required by the academicians — absolute clarity, absolute form, beginning, middle, end.E. P.
  2. Cf. Caustier ; Anatomie et physiologie animale et végétale
  3. Nous aurions mis « Providence » si le roman avait été destiné à « La Croix »