Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ADALBÉRON II

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ADALBÉRON II, évêque de Metz, était fils de Frédéric Ier, comte de Bar et duc de la Lorraine Mosellane, et de Béatrix, fille de Hugues le Grand, père de Hugues Capet. Après la mort de Thierri Ier, il fut placé sur le siége de Metz, en 984. Sa douceur et son affabilité lui gagnèrent bientôt l’affection de son troupeau, qu’il édifiait par ses vertus. Il recevait dans sa maison épiscopale tous les pauvres et tous les pèlerins, leur lavait les pieds et les servait lui-même à table. La terrible maladie connue sous le nom de feu sacré s’étant fait sentir à Metz, il changea son palais en hôpital pour les victimes de la contagion. Il pansait lui-même leurs ulcères et les soignait avec un admirable dévouement. Il ne célébrait jamais les saints mystères sans être revêtu d’un cilice et sans verser des larmes. Quoique sa vie fût une mortification continuelle, il redoublait cependant ses austérités les veilles des fêtes et pendant le carême, qu’il avait l’habitude de passer dans la retraite à l’abbaye de Gorze. Ce monastère, comme celui de Saint-Symphorien et plusieurs autres, fut l’objet de ses libéralités et de ses soins. Sa vigilance s’étendait à tous les établissements religieux de son vaste diocèse.

Ce charitable et doux prélat savait, au besoin, montrer une grande fermeté et un courage inébranlable. Il réforma un grand nombre de monastères ; il en chassa les supérieurs mal famés et leur en substitua d’autres, revêtus des qualités requises pour être placés à la tête d’une communauté religieuse. On assure qu’il fit, pour différents monastères, quarante consécrations abbatiales. On assure aussi qu’il ordonna plus de mille prêtres. Pour être admis aux ordres, il n’exigeait des candidats qu’une vie exemplaire et les talents requis par les saints canons. Il ne faisait aucune attention à leur naissance, et son choix tombait souvent sur ceux dont l’origine était obscure : Nullum causa natalium ratus esse rejiciendum, quia apud Deum omnes sunt œquales. (Voyez Gallia christ nov., t. XIII, p. 728.)

Dans un concile tenu en 1002, il insista avec force sur la nécessité de maintenir les dispositions canoniques concernant les empêchements de mariage, et il ne craignit pas de rappeler publiquement à son devoir le comte Conrad qui avait contracté une union dans un degré prohibé de consanguinité. Il porta lui-même les armes pour défendre ses sujets contre le brigandage de quelques nobles dont il rasa les retraites et les forteresses. Tous ses sujets et les juifs même le regardaient comme leur protecteur et leur père.

Deux fois, il fit le pèlerinage de Rome, pour y gagner les grâces du jubilé et satisfaire sa dévotion envers les saints apôtres. Au mois de mai 1005, il se rendit chez son frère Thierri, duc de la Lorraine Mosellane, pour l’engager à restituer des propriétés que celui-ci avait enlevées à l’abbaye de Saint-Arnoul. Étant parvenu de Metz à Numéniac (Numeniacum), au milieu d’une chaleur caniculaire, il y tomba gravement malade et éprouva une attaque de paralysie. Son frère accourut auprès de lui, et la désolation du clergé et du peuple fut à son comble, lorsqu’on apprit que la vie d’Adalbéron était en danger. Après quelques jours de repos, le prélat se fit transporter dans sa ville épiscopale, où il s’arrêta d’abord à l’église de Saint-Étienne pour recommander son troupeau à la protection du ciel. Lorsqu’il sentit sa fin approcher, il distribua aux pauvres et aux églises tout ce qui lui restait ; et après avoir langui pendant plusieurs mois, il mourut, le 14 décembre de la même année 1005. Ses obsèques furent célébrées avec grande pompe par son ancien disciple Berthold, évêque de Toul, et son corps fut inhumé dans l’église de Saint-Symphorien.

Adalbéron est honoré comme bienheureux, le 14 décembre. Sa vie a été écrite par Constantin, troisième abbé du monastère de Saint-Symphorien, qui reçut de lui la bénédiction abbatiale et que les auteurs de la Gallia Christ. nov., t. XIII, p. 729, nomment auctor gravis et œqualis. Cette vie a été publiée par le père Labbe, dans sa Nova Bibliotheca manuscriptorum librorum, t. I, p. 670, d’après un manuscrit de la bibliothèque de Claude Hardy. On y trouve aussi, p. 681, une lettre adressée à Adalbéron II par Hildeward, évêque de Halberstadt, mort en 996, pour obtenir de lui une parcelle des reliques de saint Étienne et de sainte Glossinde. Hildeward y parle d’un don qu’il fait à notre prélat : Ad declarandum, dit-il, in vos nostrœ devotionis igniculum, divini cui indigni deservimus altaris speciale donum, doctrinœ videlicet et veritatis Rationale vocatum venerabilis papœ Agapeti decreto sibi collatum, prout nobis vestra claritas per fratrem communem nostrum Meinzonem injunxit, quia unum dividere non potuimus, exemplar illius vobis devotissime, direximus. C’était sans doute un rational des divins offices, orné de miniatures.

P. F. X. de Ram.