Biographie nationale de Belgique/Tome 1/AMAND, Saint

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* AMAND (Saint), évêque, missionnaire. Vers la fin du vie siècle vivait à Herbauges, ville de la seconde Aquitaine, une famille de Gallo-Romains, dont le chef, Serenus, gouvernait sagement le pays comme vassal des rois francs. Rien ne parut manquer à la grandeur de sa maison, déjà riche autant que puissante, quand Dieu le rendit père, en 594, d’un fils qui reçut le nom d’Amand et qui lui laissa entrevoir dès l’enfance les qualités les plus brillantes. Mais la Providence avait sur le jeune homme d’autres vues que Serenus. Elle sut lui inspirer bientôt un profond dégoût des biens et des honneurs du monde qui le porta à se retirer d’abord dans un couvent de l’île d’Yeu et ensuite près du tombeau de Saint-Martin à Tours, où il reçut la tonsure cléricale. Plus tard, il se rendit à Bourges et s’y renferma, d’après les conseils de l’évêque saint Austrégisile, dans une retraite absolue qu’il rendit heureuse et douce par la pénitence et l’étude des saintes lettres. Ce fut pendant cette vie solitaire de quinze ans qu’il fut promu au sacerdoce. Afin de mieux se préparer ensuite aux travaux de l’apostolat, pour lequel il se sentait une vocation singulière, il se rendit à Rome et y reçut de saint Pierre, qui lui était apparu en vision, l’ordre de porter la parole de vie dans les parties encore idolâtres de la Gaule. Sacré évêque régionnaire à son retour, Amand s’empressa de remplir sa mission, et s’enfonçant dans les forêts de la Ménapie, il prêcha d’abord l’Évangile à Courtrai et à Tourhout, où il apprit qu’il existait, sur les rives de l’Escaut un canton appelé Gant, redouté par les missionnaires à cause de la stérilité des terres et la férocité des habitants. Inaccessible à la crainte, le jeune apôtre y pénétra et fut effectivement honni, maltraité et plus d’une fois jeté dans l’Escaut par ces barbares ; mais son inaltérable douceur, sa parole persuasive et surtout un miracle qu’il obtint du Tout-Puissant changèrent entièrement leurs dispositions : ils accoururent bientôt en foule aux instructions du saint, brisèrent eux-mêmes les idoles et détruisirent leurs temples. Pour consolider son œuvre, Amand établit dans l’endroit deux abbayes auxquelles la piété et la science des religieux acquirent plus tard une grande célébrité. Dans ces fondations, l’homme de Dieu avait été puissamment secondé par le roi Dagobert ; il s’en crut d’autant plus obligé de reprendre ce prince de son libertinage. Une sentence d’exil fut la récompense de son zèle, et le força de se retirer dans les États du roi Caribert, où il mit sa disgrâce à profit en évangélisant les pays qu’on appela depuis Gascogne et provinces basques. Aussitôt cependant que Dagobert, revenu à des sentiments meilleurs, l’eut invité à rentrer à sa cour et à baptiser son fils Sigebert, le pieux missionnaire se hâta d’obéir, mais il ne voulut à aucun prix y demeurer comme précepteur du jeune héritier, parce que cette charge ne pouvait se concilier avec ses courses apostoliques. Ce fut par le même motif qu’il n’accepta qu’à regret et sur les vives instances de saint Aubert de Cambrai et de saint Modoald de Trèves, sa nomination à l’évêché de Tongres, et qu’il se hâta de s’en démettre aussitôt que le lui permit le pape saint Martin. Il avait dans l’intervalle rendu d’éminents services à l’illustre famille des Pepins et ramené dans les voies de la sainteté le fameux Allouin ou Bavon, comte puissant de la Hesbaye. Il reprit ensuite, quoique avancé en âge, ses prédications évangéliques et n’y renonça que lorsqu’il sentit, devenu plus qu’octogénaire, les infirmités de la vieillesse. Retiré dans le monastère d’Elnon ou de Saint-Amand (berceau de la petite ville, aujourd’hui française, de Saint-Amand), qu’il aimait mieux que ses autres abbayes, il y passa encore quelques années à instruire les moines et mourut saintement le 6 février 684. Une multitude de paroisses, tant en France qu’en Belgique, portent le nom de Saint-Amand.

J.-J. De Smet.

Acta SS. mensis Februarii, dies 6.