In eminenti apostolatus specula/traduction 1820

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Clément XII
Le Spectateur belge de 182011 (p. 300-303).

CLÉMENT Évêque, Serviteur des Serviteurs de Dieu, à Tous les fidèles de Jésus-Christ Salut et Bénédiction Apostolique.


§. II. Élevé par la Providence Divine au plus haut degré de l’Apostolat, tout indigne que nous en sommes, d’après le devoir de la surveillance pastorale qui nous est confié, nous avons constamment, secondé par la Grâce Divine, porté notre attention avec tout le zèle de notre sollicitude, sur ce qui peut, en fermant l’entrée aux erreurs et aux vices, servir à conserver surtout l’intégrité de la Religion orthodoxe, et à bannir du monde Catholique, dans ces tems si difficiles, les dangers des troubles.

Nous avons appris même par la rumeur publique, qu’il se répand au loin, chaque jour avec de nouveaux progrès, certaines Sociétés, Assemblées, Réunions, Agrégations ou Conventicules, nommés vulgairement des Francs-Maçons, ou sous une autre dénomination selon la variété des langues, dans lesquels des hommes de toute Religion et de toute secte, affectant une apparence d’honnêteté naturelle, se lient entre eux par un pacte aussi étroit qu’impénétrable, d’après des lois et des statuts qu’ils se sont faits, et s’engagent par serment, prêté sur la Bible, et sous des peines graves, à cacher par un silence inviolable tout ce qu’ils font dans l’obscurité du secret.

Mais, comme telle est la nature du crime qu’il se trahit lui-même, jetant des cris qui le font découvrir et le dénoncent, les Sociétés ou Conventicules susdits ont fait naître de si forts soupçons dans l’esprit des Fidèles, que s’enrôler dans ces Sociétés c’est, chez les personnes de probité et de prudence, s’entacher de la marque de perversion et de méchanceté ; car s’ils ne faisaient point de mal, ils ne haïroient pas ainsi la lumière ; et ce soupçon s’est tellement accru que, dans plusieurs états, ces dites Sociétés ont été depuis longtems proscrites et bannies comme contraires à la sûreté des Royaumes.

C’est pourquoi, Nous, réfléchissant sur les grands maux qui résultent ordinairement de ces sortes de Sociétés ou Conventicules, non-seulement pour la tranquillité des États temporels, mais encore pour le salut des âmes, et qu’ainsi elles ne peuvent nullement s’accorder avec les lois civiles et canoniques ; et comme les Oracles divins nous font un devoir d’advigiler nuit et jour en fidèle et prudent serviteur de la famille du Seigneur, pour que ce genre d’hommes, tels des voleurs, n’enfoncent la maison, et tels que des renards, ne travaillent à démolir la vigne, ne pervertissent le cœur des simples, et ne les percent, dans le secret, de leurs dards envenimés ; pour fermer la voie très-large qui delà pourrait s’ouvrir aux iniquités et qui se commettroient impunément, et pour d’autres causes justes et raisonnables à nous connues, de l’avis de plusieurs de nos Vénérables Frères Cardinaux de la Sainte Église Romaine, et de notre propre mouvement, de science certaine, après mûre délibération et de notre plein pouvoir apostolique, avons conclu et décrété de condamner et d’interdire ces dites Sociétés, Assemblées, Réunions, Agrégations ou Conventicules appelés des Francs-Maçons, ou connus sous toute autre dénomination, comme nous les condamnons et les défendons par Notre présente Constitution valable à perpétuité.

C’est pourquoi nous défendons sévèrement et en vertu de la sainte obéissance, à tous et à chacun des Fidèles de Jésus-Christ, de quelque état, grade, condition, rang, dignité et prééminence qu’ils soient, Laïcs ou Clercs, Séculiers ou Réguliers, méritant même une mention particulière, d’oser ou de présumer, sous quelque prétexte, sous quelque couleur que ce soit, entrer dans les dites Sociétés des Francs-Maçons ou autrement appelées, ou les propager, les entretenir, les recevoir chez soi, ou leur donner asile ailleurs et les cacher, y être inscrits, agrégés, y assister ou leur donner le pouvoir et les moyens de s’assembler, leur fournir quelque chose, leur donner conseil, secours ou faveur ouvertement ou secrètement, directement ou indirectement, par soi ou par d’autres, de quelque manière que ce soit, comme aussi d’exhorter les autres, les provoquer, les engager à se faire inscrire à ces sortes de Sociétés, à s’en faire membres, à y assister, à les aider et entretenir de quelque manière que ce soit, ou les conseiller ; mais nous leur ordonnons absolument de s’abstenir tout-à-fait de ces Sociétés, Assemblées, Réunions, Agrégations ou Conventicules, et cela sous peine d’Excommunication à encourir par tous les contrevenans comme ci-dessus, par le fait et sans autre déclaration, de laquelle personne ne peut recevoir le bienfait de l’Absolution par nul autre que nous, ou par le Pontife Romain existant alors, si ce n’est à l’article de la mort.

Voulons de plus et mandons que les Évêques et Prélats supérieurs, et autres Ordinaires des lieux, que tous les Inquisiteurs de l’hérésie fassent information et procèdent contre les transgresseurs, de quelque état, grade, condition, rang, dignité ou prééminence qu’ils soient, les répriment et les punissent des peines méritées, comme fortement suspects d’hérésie ; car nous leur donnons et à chacun d’eux la libre faculté d’informer et de procéder contre lesdits transgresseurs, de les réprimer et punir des peines méritées, en invoquant même à cet effet, s’il le faut, le secours du bras séculier.

Nous voulons aussi qu’on ajoute aux copies des présentes, même imprimées, signées de la main d’un Notaire public, et scellées du sceau d’une personne constituée en dignité ecclésiastique, la même foi que l’on ajouteroit aux présentes, si elles étoient représentées ou montrées en original.

Qu’il ne soit permis à aucun homme d’enfreindre ou de contrarier, par une entreprise téméraire, cette Bulle de notre déclaration, condamnation, mandement, prohibition et interdiction. Si quelqu’un se présume d’y attenter, qu’il sache qu’il encourra l’indignation du Dieu Tout-Puissant, et des Bienheureux Apôtres St Pierre et St Paul.

Donné à Rome, à Sainte-Marie Majeure, l’an de l’Incarnation de Notre-Seigneur MDCCXXXVIII, le IV des Calendes de Mai, la VIIIe Année de notre Pontificat.