Les Logiciels libres en documentation/1

La bibliothèque libre.
Texte établi par Marie-France Blanquet, Université Bordeaux 3 - Michel de Montaigne - IUT B (p. 4-5).

La fonction documentaire s’est généralisée dans les organismes de toutes tailles, privés ou publics, que ce soit des entreprises, des associations ou des administrations. Sous des noms divers et variés, chargé de mission information, recherchiste, iconographe, et même parfois documentaliste, les spécialistes de l’information-documentation ont vu leur utilité reconnue petit à petit dans les structures qui les emploient. L’estime qui leur est accordé vient bien sur du résultat de leur travail, mais aussi des compétences mises en œuvre pour y parvenir, le tout le plus souvent seul.

Parmi ces compétences, l’une d’elles apparaît comme de plus en plus importante, la maîtrise de l’outil informatique mis à leur disposition. Le maîtriser, d’abord sur le plan de l’utilisation courante, mais également savoir choisir dans une offre abondante ce qui répondra le mieux, matériel et logiciel, aux besoins présents et futurs de l’unité documentaire, en plus de concevoir et mettre en place la base de données documentaires que le professionnel de l’ID met ensuite à disposition de ses utilisateurs. Ces compétences, plus des compétences spécifiques dans son domaine, doivent permettre au documentaliste de parler d’égal à égal avec l’ingénieur informaticien qui lui, met les mains dans le cambouis.

Dans le choix des outils logiciels, plusieurs critères apparaissent, qui sont les mêmes pour un documentaliste que pour tout autre métier :

  • l’intégration de l’outil du documentaliste dans le réseau de la structure, qui doit bien sur assurer les missions du documentaliste, très spécifiques et qui requièrent des fonctions faites sur mesure pour lui ; mais outre ces fonctions métier, il est essentiel de permettre la communication en dehors de l’UD ;
  • le coût d’achat et de possession ensuite ; les unités documentaires sont souvent considérées comme un poste de dépenses dont le retour sur investissement est difficile à mesurer, les dépenses importantes occasionnées par l’informatisation ou la réinformatisation sont toujours à justifier ;
  • la compatibilité ascendante et descendante du logiciel choisi, c’est à dire la pérennité de ces choix : il est maintenant certain que le logiciel choisi aujourd’hui ne sera plus suffisant dans quelques années, s’il est encore maintenu par son éditeur ; et surtout, il est probable que quelque soit le logiciel choisi, même s’il s’agit du successeur de celui utilisé dans l’unité documentaire, il sera nécessaire d’effectuer une migration des données d’un logiciel vers l’autre, ce qui est toujours une question cruciale. Malheureusement, l’informatique est loin de permettre une automatisation systématique de ces tâches, et bien souvent, les données sont en partie perdues ; il est au minimum nécessaire de les reprendre dans le nouveau format.

Le monde du logiciel libre est de plus en plus mis en avant dans les choix de logiciels qui sont fait dans différents types de structures. Créé afin de permettre, par le libre accès de chacun au code source du logiciel, une adaptation de ces logiciels aux besoins de l’utilisateur final, le logiciel libre, fort d’une expérience de vingt ans, s’appuie sur une expertise en matière de réseau et de bases de données, sur sa connaissance du travail collaboratif, et sur son coût de licence nul pour concurrencer les logiciels d’éditeur. Actuellement, tous les secteurs s’y intéressent de près ou de loin, afin de bénéficier de ses atouts : ouverture, adaptabilité, stabilité, gratuité. Les deux domaines d’excellence cités (réseau, base de données, travail collaboratif) devraient lui donner de sérieux atouts pour l’élaboration de produits à destination des documentalistes.

Une étudiante de l’IUT Michel de Montaigne, Nathalie Cornée, a d’ailleurs réalisé un mémoire (disponible ici) sur ce sujet l’année dernière (en 2003) : Les logiciels libres en bibliothèque. Le titre pose immédiatement une problématique : au croisement de deux mondes aussi spécifiques que le logiciel libre et la documentation, quelle peut-être l’offre disponible qui s’adresse au documentaliste, ou faute de logiciel spécialisé, quels sont les logiciels qui peuvent être utilisés par le documentaliste afin de remplir les missions de l’Unité documentaire ? Il était apparu que les principaux logiciels utilisables étaient en fait destinés aux bibliothèques. Nathalie Cornée avait cependant dressé un inventaire de logiciels variés, remplissant de multiples tâches.

Cependant, la situation évolue vite, et des logiciels qui étaient balbutiants il y a un an, sont actuellement en voie de finalisation, ou achevés. D’autres qui étaient encore confidentiels, sont maintenant populaires. Il est possible de confronter de nombreuses applications afin de juger si les logiciels libres représentent une opportunité pour le documentaliste.

Succédant à Nathalie Cornée, nous présenterons les raisons qui poussent à choisir un logiciel issu de ce monde du logiciel libre, mais en nous attachant un peu plus à ce qui fait la validité des solutions open source. La validité du choix repose sur un certain nombre d’atouts techniques, notamment en tant que solution spécifique à des problèmes que posent les logiciels d’éditeur, dont celui de la pérennité et de l’accessibilité des données. La gratuité du logiciel est ainsi une raison de migration bien moins importante que l’excellence technique et surtout les raisons stratégiques, ou géostratégiques, qui poussent certains États à étudier leur adoption.

Après avoir ainsi justifié de l’intérêt porté au monde du logiciel libre, nous passerons au test pratique de quatre logiciels différents, choisis à la fois pour leur représentativité du logiciel libre, et pour les différentes tâches qu’ils accomplissent séparément.

Comme ces logiciels sont très différents, je les présenterai séparément et tour à tour : il s’agit de Koha et Greenstone, deux logiciels originaires de Nouvelle-Zélande ; d’Avanti, plus international dans son développement d’origine ; et de MediaWiki, exemple des wikiwikiweb, développé sur une initiative américaine, mais lui aussi international dans les faits.