Les Logiciels libres en documentation/3

La bibliothèque libre.
Texte établi par Marie-France Blanquet, Université Bordeaux 3 - Michel de Montaigne - IUT B (p. 23-27).

==Choix de logiciels==

Le choix des logiciels testés s’est porté sur un assortiment de quatre applications aux buts différents, mais dont aucun n’est spécifiquement un logiciel documentaire.

Ce choix s’explique par l’absence de logiciel spécialisé dans la gestion d’un fonds documentaire tel que nous l’entendons en France. Rappelons que le monde anglo-saxon, qui est le moteur principal de la programmation et même au-delà du système de pensée actuel, ne conçoit pas la documentation comme une activité séparée de la bibliothéconomie, mais comme une spécialisation de celle-ci. Le monde anglo-saxon ne possède donc pas de centres de documentation, mais des bibliothèques spécialisées, qui sont donc équipées de logiciels destinés aux bibliothèques.

De plus, la place comme le temps dont je dispose, ainsi que mon expérience, ne m’autorisent pas de réaliser des tests poussés, me permettant de conclure sur un conseil adressé aux documentalistes du type « Choisissez ce logiciel, il pourra répondre à tels besoins.» Je n’ai pas non plus les compétences techniques me permettant d’installer en vue de tests des logiciels complexes. C’est ainsi qu’il m’était impossible de faire un banc d’essai comparatif de logiciels remplissant tous la même tâche. Enfin, les outils logiciels liés au XML étant traités par Jérôme Bill dans son mémoire, je me contenterai de vous y renvoyer pour plus d’informations.

Donc, plutôt que de tester différents logiciels complexes aux utilisations identiques, j’ai choisi, en fonction de l’offre disponible, de proposer des évaluations limitées de logiciels aux fonctionnalités différentes, tout en essayant de donner un aperçu des possibilités offertes par le logiciel libre : celles-ci ne se limitent en effet pas au simple catalogage d’un fonds documentaire. Il tire en effet de son expérience collaborative et de travail en réseau des principes mis en œuvre dans la conception d’outils intéressants. Comme je l’ai dit plus haut, la conception même des logiciels libres fait qu’ils sont extrêmement portables d’une plate-forme à une autre. Le tableau 1 qui présente les plates formes supportées par les logiciels testés en est une illustration.

Deux des logiciels sélectionnés ont pour ambition de proposer une solution de gestion de fonds de tailles différentes : Koha et Avanti. Le premier permet de gérer une bibliothèque de grande taille. Il n’est pas le seul dans ce cas, mais il a sur ses concurrents quelques avantages :

  • il peut être évalué en ligne, à partir de la copie de la base d’une bibliothèque déjà existante (tout comme MyLibrary et PMB-PHP MyBibli);
  • il existe en version française (ce qui facilite son utilisation, et qui est un facteur déterminant pour qu’il soit accepté par de nombreux documentalistes) ;
  • certaines des caractéristiques de son développement, comme l’impératif de l’interface agréable (qui facilite l’acceptation du changement), et l’obligation qu’avait le donneur d’ordres de mettre le logiciel sous licence GPL et de rechercher des collaborations externes, car il ne pouvait pas en assurer seul la maintenance, ont fait que ce logiciel a cru rapidement et s’est internationalisé.

Avanti se destine lui à la gestion de bibliothèques de petite taille, ce qui fournit un contrepoint à ce logiciel de grande taille. Greenstone permet de gérer un type de document nouveau mais de plus en plus courant dans les centres de documentation, les documents numériques ; ce qui m’a poussé à l’inclure dans le test. Quant aux wikiwikiwebs, ils permettent de diffuser de l’information sur le web, de façon simple et rapide, et sont armés pour le travail collaboratif.


Tableau 1 : Plate-formes supportées par les différents logiciels
Koha Avanti Greenstone MediaWiki
Windows 3.1 X
Windows 95 et 98 X X
Windows 2000 X X X
Windows XP X X
Windows NT X X X
Distributions Linux X X X X
Mac OS X X X X
Solaris X
UNIX X X X

Présentation des logiciels testés[modifier]

Logiciels de gestion de bibliothèque : une opportunité pour le documentaliste ?[modifier]

Entrent dans cette catégorie les SIGB (Systèmes intégrés de gestion de bibliothèque) Koha (voir Image 1 ci-contre), qui est présenté dans ce mémoire, mais aussi PMB (anciennement PHP MyBibli), OpenBiblio, GNUTECA (disponible en portugais uniquement), MyLibrary, ou encore le plus ancien, CDS/ISIS, qui est soutenu par l’Unesco.

Fichier:Logo-Koha.gif
Image 1 : Logo de Koha

Koha est le projet le plus abouti de tous : il approche de la version 2 ; c’est également le plus répandu. Son histoire est intéressante, puisqu’il a été développé en seize semaines seulement par une société privée, Katipo Communications Ltd, à la demande de la Horowhenua Library Trust, en Nouvelle-Zélande. Cela prouve qu’il est tout à fait possible de faire travailler une société privée au développement d’applications dont le contrôle lui échappera totalement par la suite, pour le bien commun.

Katipo avait déjà travaillé sur un projet similaire avec la bibliothèque de Wellington. La durée de développement était impérative, car il fallait changer le vieux SIGB, auquel le passage à l’an 2000 devait être fatal. Depuis, le développement de Koha ne s’est pas arrêté à une première version, et de nouvelles améliorations sont régulièrement proposées. Ces développements sont financés :

  • par des bibliothèques qui font travailler des développeurs sur le projet ;
  • des bibliothèques qui paient des développements spécifiques qui sont ajoutés au « pot commun » ;
  • des professionnels de la programmation ou de l'ingénierie documentaire qui souhaitent s'investir commercialement dans les services associés au logiciel ;
  • des programmeurs volontaires qui développent des fonctionnalités sur leur temps libre.

On voit la source du succès de Koha : là où la plupart des projets open source ne disposent que de la quatrième source d’heures-homme de travail, informelle et plus ou moins irrégulière, Koha dispose de quatre types de contributeurs, qui de plus ont des intérêts immédiats à porter le projet, ou leur partie de projet, à terme.

Dix bibliothèques au moins utilisent Koha en France :

  • des établissements universitaires : l’ESIEE (École Supérieure d'Ingénieurs en Électronique et Électrotechnique), l’École de commerce Wesford de Grenoble, l’École Nationale Supérieure des Mines de Paris, l’École des Mines de Nantes, le Centre Roland Mousnier à la Sorbonne, l’Équipe de logique mathématique à Jussieu ;
  • la bibliothèque de la communauté de communes de Lafrançaise (Tarn-et-Garonne) ;
  • les bibliothèques de l’abbaye Notre-Dame des Dombes et de l’abbaye de Maylis, et la bibliothèque diocésaine de Chambéry. D’après la liste de diffusion parue le 12 juillet, 3 autres bibliothèques sont en train de l’installer, et d’autres l’utilisent sans vouloir être citées nommément.

Enfin, le logiciel Koha a été récompensé du premier "Trophée du Libre" en 2003, dans la catégorie « Logiciel libre pour structure publique ».


Dans sa version finale, Avanti sera quant à lui un logiciel fonctionnant selon une architecture client-serveur, sur plate-forme Windows ou Unix, ne nécessitant que l’installation de Java pour fonctionner, entièrement configurable sans manipulation de code brut, indexant tous les champs, index permettant une recherche booléenne complexe sur plusieurs champs. Enfin, il proposera une interface simple et facile d’usage.

Il peut fonctionner soit sur un poste informatique simple, soit sur un couple serveur-client, ce qui rend donc possible la consultation à distance. Il intègre la gestion des mots de passe, ce qui lui confère le rang d’un OPAC.

Il connaît un développement qui n’est pas particulièrement rapide, en raison d’une équipe réduite (7 développeurs), mais son positionnement original (sur plate-forme Java), et sa légèreté en font un logiciel intéressant pour de nombreuses structures de petite taile. Il n’est pas encore achevé (version beta 3) mais il est déjà possible de voir comment il fonctionne.

Logiciels légers à vocation de gestion documentaire[modifier]

Fichier:Greenstone logo.jpg
Image 2 : Logo de Greenstone
Je mets dans cette catégorie les applications légères destinées à gérer une base de données documentaire, ou qui incluent des fonctionnalités pouvant intéresser le documentaliste. Outre les logiciels de gestion de références (eDocs), on trouve certains logiciels de gestion des documents numériques. Librarian est un programme sous GPL qui permet de créer une base documentaire de PDF en les annotant. Il a été téléchargé 2500 fois environ. Il fonctionne avec une base SQL installé, un serveur web Apache, et est programmé en PHP. Il fonctionne sur Windows98/XP, UNIX/Linux, Mac OS X, Solaris

Du même type, mais plus complet et plus simple à installer, Greenstone (Voir Image 2), qui peut combler un manque dans l’équipement logiciel d’un centre documentaire. Il est lui aussi dédié à la gestion des documents numériques, qu’il indexe dans une base propre.

Il est édité par l’université de Waikato, en Nouvelle-Zélande, au sein du programme New-Zealand digital library, ce qui donne deux assurances à l’unité documentaire voulant l’utiliser :

  • il a été conçu dans une bibliothèque spécialisée, ce qui doit assurer une certaine cohérence entre les besoins de documentation et le produit fini ;
  • l’adossement du logiciel à une institution publique lui constitue un facteur de pérennité supplémentaire.

L’université diffuse d’ailleurs le logiciel également sur CD-ROM. Il permet de créer une base documentaire de documents numériques au format PDF, txt, doc et email, soit les documents numériques les plus courants.

Autre logiciel intégrable dans la chaîne documentaire[modifier]

En-dehors de la sphère des logiciels destinés à assurer les missions traditionnelles dans un fonds documentaire, la gestion du fonds, celle du prêt éventuellement, celle de la recherche dans ce fonds surtout, il existe d’autres logiciels libres impliqués dans la gestion des flux d’information pouvant être utile au documentaliste.

Fichier:Logo-Mediawiki-memoire.png
Image 3 : Logo de MediaWiki
J’ai déjà évoqué les logiciels de gestion de contenu, comme SPIP, Zope et Nuxeo. Le web est de plus en plus difficile à contourner lorsqu’on prétend diffuser de l’information, ces outils libres, gratuits, performants et simples d’emploi pour SPIP, méritent donc d’être évoqués.

Mais il y a un type de logiciels particuliers, apparus récemment, qui permet de diffuser de l’information de façon innovante. Il s’agit de la famille des wikiwikiwebs, dont le nom est formé sur la racine wiki, qui signifie rapide en hawaïen. Un logiciel wikiwikiweb, ou plus simplement un wiki, permet la modification d’une page web par son lecteur de façon simple et rapide. C’est ce principe qui a permis la création de la Wikipédia.

Plusieurs de ces logiciels sont diffusés sous licence GNU GPL, j’en évoquerai un seul, MediaWiki (logo ci-contre, Image 3), et je me baserai sur son utilisation dans la Wikipédia pour le présenter plus complètement.