Les Pierres de Venise/Chapitre 9

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Traduction par Mathilde P. Crémieux.
Renouard (p. 227-238).

CHAPITRE IX

INFIDELITAS


Aux différentes manifestations de l’orgueil de la Renaissance devait inévitablement se mêler un autre élément, compagnon forcé de l’orgueil. Il est écrit : « Celui qui a confiance en son propre cœur est un fou » et aussi : « Le fou s’est dit dans son cœur : Il n’y a pas de Dieu ! » L’adulation de soi-même aboutit fatalement à une infidélité d’autant plus redoutable qu’elle conserve la forme et le langage de la foi.

Deux voies différentes, qu’il faut distinguer, conduisirent au manque de foi : celle qui fut la conséquence du respect pour le paganisme et celle qui découla de la corruption du catholicisme. Car, de même que l’architecture romaine ne peut être rendue responsable de la corruption antérieure du Gothique, de même la philosophie romaine ne peut être rendue responsable de la corruption antérieure de la Chrétienté. À mesure que l’histoire de la vie du Christ, rendue plus obscure par l’atmosphère brumeuse de l’histoire du monde, s’éloigna dans la nuit des ans ; que les actions et les incidents intermédiaires se multiplièrent ; que les changements sans nombre dans la manière de vivre et de penser rendirent plus difficile à l’homme de se représenter des faits aussi lointains, il fallut au cœur fidèle un effort plus grand pour concevoir dans son entière véracité et dans sa vitalité l’histoire de son Rédempteur : il fut, d’autre part, plus facile aux esprits superficiels et nonchalants de se tromper sur le véritable caractère de la croyance qu’on leur avait enseignée. Et il en eût été ainsi quand bien même les pasteurs de l’Église n’eussent pas manqué de vigilance, quand bien même l’Église n’eût commis aucune erreur de doctrine ou de pratique. Mais lorsque, d'année en année, les vérités de l’Évangile s’éloignèrent davantage en s’adjoignant quelque fausse ou sotte légende ; quand un travestissement volontaire s’ajouta à cette obscurité naturelle ; quand la mémoire trop fugitive disparut sous la fécondité de la fiction; quand, de plus, l’énorme pouvoir temporel accordé au clergé attira dans ses rangs une foule d'hommes qui, sans cet appât, n’eussent pas songé à revendiquer le nom de Chrétiens, les loups pénétrèrent dans le troupeau et ne l’épargnèrent pas. Lorsque, grâce aux manœuvres de ces hommes et à l’indifférence des autres, la forme et l’administration de la doctrine et de la discipline ne furent plus qu’un moyen d’agrandir encore le pouvoir du clergé, il ne fut plus possible aux hommes religieux, capables de réflexion, de conserver, sans inquiétude, la sérénité de leur foi. L’Église était tellement mêlée au monde que son témoignage n’était plus valable : ceux qui s’aperçurent de sa corruption et à qui leur intérêt ou leur simplicité n’imposait pas le silence, se séparèrent peu à peu en deux courants d’énergie opposée ; l’un allant vers la Réforme et l’autre vers l’Infidélité.


Ce dernier courant resta à part, surveillant la lutte de l’Église romaine et du Protestantisme, lutte qui, bien que nécessaire, fut accompagnée de grandes calamités pour l’Église. Au début, le Protestantisme ne fut pas, en réalité, la Réforme mais plutôt la Réanimation. Il voulait [image]infuser à l’Église une vie nouvelle, et non la réformer à nouveau : en un mot, on brisait simplement les haies pour que tous les passants pussent cueillir les raisins. Les réformateurs comprirent bientôt que l’ennemi n’était jamais bien loin derrière celui qui semait le bon grain, que le mauvais esprit entrerait aussi bien dans les rangs de la Réforme que dans ceux de la résistance et que, bien qu’on pût enlever l’ivraie du froment, il y avait peu d’espoir de mettre celui-ci à l’abri de la gangrène. Satan inventa de nouvelles tentations pour s’opposer à la force renaissante de la chrétienté : de même que le catholique romain, confiant dans ses professeurs humains, ne se préoccupait plus de savoir s’ils étaient véritablement les envoyés de Dieu ; de même le protestant, confiant dans l’enseignement de l’Esprit, ne s’inquiéta pas de savoir si chaque esprit était vraiment inspiré par Dieu. Alors, mille enthousiasmes, mille hérésies obscurcirent rapidement la foi et divisèrent la force de la Réforme.


Le mal le plus profond vint de l’antagonisme des deux grands partis. Aux yeux de l’incrédule, l’Église du Christ, pour la première fois depuis sa formation, eut l’aspect d’une maison en guerre contre elle-même. Non qu’il n’y eût eu déjà des schismes, mais, ou bien ils étaient restés obscurs et silencieux, cachés dans l’ombre des Alpes ou dans les marais du Rhin, ou bien, ils avaient été l’apparition d’une erreur manifeste rejetée par l’Église, erreur sans racine, ne s’étant pas, malgré sa faute, beaucoup éloignée du terrain de la vérité. Mais, cette fois apparaissait un schisme s’appuyant sur la vérité et sur l’autorité : son corps, rejeté, ne se flétrissait pas ; il lança ses rameaux dans la mer, ses branches dans la rivière, et ce fut sur le vieux tronc qu’apparurent les signes de la décrépitude.

D’un côté, était la foi ravivée, tenant la Bible ouverte dans sa main droite, sa main gauche levée vers le ciel qu’elle appelait en témoignage ; de l’autre, étaient ou paraissaient être toutes les coutumes aimées, les traditions admises, tout ce qui, depuis quinze cents ans, avait pénétré dans le cœur de l’homme, lui apportant un précieux secours : légendes longuement accréditées ; pouvoir longuement respecté ; discipline longuement pratiquée. — Foi qui avait guidé la vie et scellé le départ d’innombrables âmes ; prières qui, de la bouche du père à celle de l’enfant, avaient distillé leurs ondes bienfaisantes, ondes semblables à celles de ces cascades qui résonnent dans le silence des temps, se transformant en une poussière d’eau qui monte jusqu'au ciel d’où elle retombe sur les pâturages incultes ; — Espérance, qui, au milieu des tortures, avait donné aux visages l’impassibilité de la pierre, qui avait transformé l’épée en flamme pendant les combats ; qui avait dévoilé le but de la vie et dirigé sa force ; illuminé les derniers regards et inspiré les dernières paroles des mourants ; — Charité qui avait uni les communautés des montagnes et du désert et forgé des chaînes de pitié, des aspirations de communion entre le monde et l’impénétrable qui l’entoure ; et, plus que tout cela, les esprits des innombrables morts qui, n’ayant pas connu le doute, indiquaient la ligne qu’ils avaient été heureux de suivre et qui leur avait apporté la paix. Tout cela était de l’autre côté, et le choix qui eût toujours été douloureux était rendu dix fois plus douloureux encore par l’animosité naturelle, mais coupable, que chaque partie de l’Église ressentait contre l'autre.


D’un côté, cette animosité était inévitable. Le parti romain comptait, dans le nombre des chrétiens qui le formaient, les pires parmi ceux qui réclamaient ce titre, et tandis qu’il gardait encore nombre de croyants, gens simples, ignorant la corruption du corps auquel ils appartenaient, incapables d’accepter des doctrines autres que celles dont avait été nourrie leur enfance ; il réunissait, à leurs côtés, tous les appétits charnels et sensuels du peuple et du clergé, tous les amoureux du bien-être et du pouvoir. Et la rage de tous ces gens ne pouvait qu’être immense contre ceux qui discutaient leur autorité, leur reprochant leur genre de vie et leur méthode d’endormir la conscience des vivants en leur faisant payer leur salut à leur lit de mort.


En outre, la nouvelle assertion et la défense de certains dogmes qui n’avaient guère été jusqu’alors que des erreurs flottant dans l’esprit populaire, mais qu’on dut, en présence des attaques que les protestants dirigeaient contre eux, rattacher par une bande de fer et d’airain au corps de la doctrine romaine, lui donna une forme à la fois plus rigide et moins rationnelle. Quantité d’esprits qui, à une autre époque, eussent apporté à l’Église leur contingent d’honneur et de force en prêchant les vérités vitales qu’elle conservait encore, ne furent occupés qu’à défendre ou à glorifier des mensonges travestis ou des frivolités hors d’usage. Tout observateur de bonne foi comprendra que les erreurs excusées par Dieu dans les temps d’ignorance devenaient impardonnables en étant formellement définies et défendues ; que les faussetés rendues excusables par l’entraînement d'une foule enthousiaste criaient vengeance devant l’opiniâtreté d’un concile et que, par-dessus tout, la grande invention du siècle qui rendit la parole de Dieu accessible à tous les hommes, enleva toute excuse à ceux qui se révoltèrent contre elle. Du moment où Rome s’opposa à la diffusion populaire de la Bible, on prononça contre elle la sentence qui la voua au mépris de ses propres enfants. Du trône sur lequel, defiant le ciel, elle s’était élevée, elle tomba si bas qu’on put voir, dans les temples de la Chrétienté, l’inimaginable et honteuse parodie de la scène de Bethléem ! La Judée avait vu son Dieu couché dans la mangeoire des bêtes de somme ; il appartenait à la Chrétienté de donner aux bêtes de somme l’autel de son Dieu pour étable !


De son côté, l’opposition du Protestantisme à la Papauté opposition souvent intempérante, sans restriction, sans prudence, lui fît beaucoup de tort. Et pourtant, il ne pouvait guère en être autrement : saignant encore sous le glaive de Rome, tremblant encore sous ses anathèmes, les Églises réformées oublièrent fatalement tous ses bienfaits, tous ses enseignements. Les injures romaines les conduisirent à l’irrévérence ; les mensonges romains à la méfiance ; l’esprit de présomption et de raisonnement trop hâtif se développa journellement. Les sectes engendrèrent d'autres sectes ; les miracles de l’Église primitive furent niés, ses martyrs oubliés — bien que leurs palmes fussent réclamées par chaque secte persécutée ; — l’orgueil, la méchanceté, l’amour du changement s’appelèrent soif de vérité et se mêlèrent au juste ressentiment de la déception.

Il devint impossible à l’homme le meilleur et le plus franc de reconnaître la plaie de son propre cœur, tandis que l’avarice et l’impiété traitaient ouvertement la Réforme de brigandage et transformaient ses reproches en sacrilèges.


Tout ce mal fut indépendant de l’étude des écrivains classiques qui trouva la foi chrétienne affaiblie et divisée et qui produisit, en conséquence, un effet beaucoup plus puissant qu’elle ne l’eût fait à toute autre époque. Elle conduisit les hommes à faire plus attention aux mots qu’aux choses : on découvrit que la langue du moyen âge avait était corrompue et l’objectif de tous les écrivains fut de purifier leur style. À cette recherche des mots, on ajouta celle de la forme ; elles furent, toutes les deux, considérées comme de première importance ; la moitié de l’intelligence du temps fut absorbée par l’étude inférieure de la grammaire, de la logique et de la rhétorique, études indignes d’un sérieux travail[1], car elles rendent ceux qui s’y emploient incapables de hautes pensées et de nobles émotions.

Pour avoir la preuve de la tendance abaissante de la philologie, il suffit de lire les annotations d’un grammairien sur un grand poète. La philologie est à peu près aussi utile à ceux qui l’ignorent que le serait, pour un homme qui ne peut marcher, une machine poussant alternativement un pied devant l’autre. Quant à la rhétorique c’est une étude réservée à ceux qui veulent tromper ou être trompés : celui qui a la vérité dans son âme ne doit pas craindre, pour sa bouche, le manque de persuasion ; s’il le redoute, c’est que la basse rhétorique empêche la vérité d'être comprise.


Ces sciences eurent un effet fatal pour la religion : on constata que l’enseignement du Christ manquait de rhétorique ; que les prédications de saint Paul manquaient de logique et que le grec du Nouveau Testament n’observait pas les règles de la grammaire. La simple vérité, le profond pathos, la période rapide sautant d’un point à un autre en laissant à l’auditeur le soin de remplir les intervalles ; l’idiome peu travaillé et hébraïsé offrait peu d’attrait aux amateurs de phrases et de syllogismes ; et la grande science du siècle devint la pierre d’achoppement pour la religion.


Mais ce ne furent pas uniquement les grammairiens et les logiciens qui furent ainsi pervertis, c’eût été une faible perte : des hommes réellement capables d’apprécier la haute excellence des classiques furent malheureusement entraînés par un courant d’enthousiasme qui les enleva à toute autre étude. On continua, pour la forme, à professer la religion chrétienne, mais on n’eut plus le temps de lire la Bible ou les écrits des Pères que le cœur n’était plus disposé à écouter. L’esprit de l’homme n’est capable que d'une certaine dose d’enthousiasme et de respect et celui qui s’adressait à Horace[2] était enlevé à David. La religion est, de tous les sujets, celui qui supporte le moins de n’occuper que la seconde place dans le cœur ou dans la pensée, et lorsqu’on ne l’étudié que languissamment et sans suite, on est certain d’aboutir à l’erreur ou au manque de foi. D’autre part, ce qu’on admirait, ce qu’on contemplait sans cesse en arriva bientôt à être presque une croyance et la mythologie païenne prit, dans la pensée humaine, la place que le Christianisme perdait sans s’en apercevoir. On ne sacrifia pas à Jupiter, on ne construisit pas à Diane des autels d’argent, mais les idées du paganisme prirent corps et furent toujours présentes à l'esprit. Qu’importait à la vraie religion que l’homme crût ou ne crût pas à la divinité de l’image païenne, si elle occupait toutes ses pensées ? si la vue d’un éclair évoquait le souvenir de Jupiter et le clair de lune celui de Diane et si, bien que son cœur ne fût que secrètement entraîné, l’homme oubliait le Dieu qui est au-dessus de lui ?

En réalité, cette double croyance du christianisme avoué et du paganisme aimé fut plus fatale que le paganisme lui-même, car elle écartait toute croyance réelle et pratique. Mieux eût valu adorer Diane et Jupiter que de traverser la vie en nommant un Dieu, en en imaginant un autre et en n’en craignant aucun. Mieux eût valu être « un païen nourri dans quelque croyance usée » que de naviguer sur la grande mer de l’Éternité sans voir un Dieu marcher sur les flots, sans entrevoir à l’horizon le monde céleste ?


Ce fatal résultat de l’enthousiasme pour la littérature classique fut hâté et augmenté par la mauvaise direction dans laquelle l’art s’égara ; il ne songea qu’à donner la vie aux croyances païennes, et l’exaltation des facultés humaines, employée jusqu’alors au service de la foi, passa au service de la fiction. L’imagination ayant la bride sur le cou, le terrain des faits manqua sous ses pieds et, après avoir guidé les hommes vers la vérité, elle essaya de leur faire croire le mensonge.

Ses facultés furent gâtées par leur propre trahison ; une par une, elles tombèrent dans le champ du potier. Raphaël, qui avait paru envoyé et inspiré par le ciel pour peindre les apôtres et les prophètes, abaissa sa puissance jusqu’aux pieds d’Apollon et des Muses[3].

Mais ce ne fut pas tout : l'habitude d'employer les plus grands dons de l’imagination à des sujets fictifs enleva de la valeur à la représentation de la vérité. Les Vierges et les Anges perdirent de leur vraisemblance à mesure que celle des Jupiters et des Mercures augmentait; les incidents de l’Iliade et ceux de l’Exode furent placés au même niveau de croyance. Et, à mesure que l’imagination n’étant plus soutenue par la foi, s’éteignait de plus en plus, l’habileté de facture et la science artistique grandissaient sans cesse et furent bientôt considérées comme les qualités maîtresses d’un tableau, le sujet n’étant plus chargé que de les mettre en évidence. Plus l’artiste avait de talent, moins le sujet avait d’importance et on exécutait, avec une égale indifférence, des tableaux sacrés, profanes ou sensuels qui n’étaient plus que des prétextes au développement de la couleur et de la perfection du rendu ; c’est pourquoi, dans nos musées, une Madone est placée à côté d’une Aphrodite ; une Bacchanale à côté d'une Nativité.

Ce mal eût pu être causé, dans l’esprit le plus vertueux, par l’enthousiasme classique et l’admiration artistique, mais il tomba, malheureusement, sur des esprits énervés par toutes les jouissances et poussés, par leurs plus bas instincts, à l’oubli de tout sentiment religieux. Les crimes des chrétiens complétèrent ce qu’avait commencé, contre la foi, le génie des païens ; la ruine préparée par l’étude, fut achevée par la sensualité. Les formes des déesses païennes, leur nature convenaient admirablement au goût de l’époque, et l’Europe redevint païenne, tout comme au IIe siècle.

Comme aujourd’hui, un faible noyau de croyants représentait l’Église du Christ au milieu des infidèles. Mais la différence fatale qui existe entre le IIe et le XIXe siècle, c’est qu’actuellement, les païens sont, de nom, d’élégants chrétiens, aux croyances très variées, chez qui il est difficile de noter le point où l’absence de foi et de pratique confine à l’infidélité absolue : il est d’ailleurs admis comme principe de politesse de ne pas s’enquérir des opinions religieuses de ses voisins, de façon à n’être offusqué par aucune infraction brutale à la forme extérieure.

En réalité, nous nous méfions les uns des autres, et de nous-mêmes. Nous savons que, si nous posions à notre voisin une question de croyance, nous reconnaîtrions, neuf fois sur dix, qu’il s’est fait un christianisme adapté à sa conscience, et qu’il doute de beaucoup de choses auxquelles nous ne croyons plus avec assez de fermeté pour que son doute ne nous ébranle pas. Alors, nous appelons charité ce qui est, tout simplement, pusillanimité et manque de foi, et nous considérons comme une preuve de bienveillance de pardonner parfois aux hommes leur manque de pratique, en considération de leur foi reconnue, et de leur pardonner parfois leur flagrante hérésie en considération de leur admirable pratique.

C’est ainsi que, abrités sous de beaux noms, nous en sommes arrivés au triomphe du système païen.

Je crois qu'un jour viendra où nous nous réveillerons comme d’un mauvais rêve, grâce aux secrètes racines du Christianisme que Dieu a implantées par le fer dans le sol de la nation anglaise. Mais, chez les Vénitiens, les racines mêmes étaient pourries et leur orgueil les fit tomber du palais de leur ancienne religion jusqu’aux pâturages où se nourrissent les bêtes. De l’orgueil à l’infidélité, de l’infidélité à la poursuite éhontée du plaisir et de là, à l’irrémédiable dégradation, les transitions furent aussi rapides que la chute d'une étoile.

Les beaux palais de la hautaine noblesse vénitienne furent arrêtés, avant que leurs fondations fussent sorties de terre, par le souffle cruel de la pauvreté; les mauvaise herbes, à chaque marée, envahirent les fragments inachevés de leurs puissantes colonnes : alors l’orgueil du peuple sans Dieu entendit pour la première fois le : « Jusqu’ici tu viendras ! » Et la régénération dans laquelle ils avaient mis une si vaine confiance — la nouvelle naissance, la brillante aurore de l’art, de la science, de l’espoir, — devinrent pour eux l’aurore qu’Ezéchiel vit se lever sur les collines d’Israël : « Voici le jour, regarde-le, il est venu. La verge a fleuri, l’orgueil s’est épanoui ; et la violence se lève pour servir de verge contre les méchants. Aucun ne restera de cette multitude ; que l’acheteur ne se réjouisse pas, que le vendeur ne s’afflige pas ; car la colère éclatera contre toute cette multitude. »



  1. Le lecteur a peut-être besoin de reprendre haleine! Tout cela, pourtant, est vrai (ou à peu près) quoique un peu trop expansif. La logique et la rhétorique sont d’excellentes études pour les sots et les hypocrites. Tous les esprits bien équilibrés pratiquent le raisonnement aussi facilement que la marche ; toutes les lèvres saines parlent pour l’amour de la vérité et non de l’émotion. Néanmoins, à un certain moment de la vie, la grammaire peut être une étude utile et même une amusante distraction; mais que vous disiez : « deux et deux font quatre » ou « deux et deux fait quatre » ; peu importe, aucune recherche grammaticale ne pourra faire dire honnêtement que deux et deux font cinq !
  2. Vrai ; néanmoins, on doit en ressentir beaucoup pour Horace.
  3. Vrai, au point de vue général, mais le Parnasse est la plus grandiose des fresques de Raphaël, au Vatican.