Les Relieurs français (1500-1800)/Avertissement

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Les Relieurs ayant fait partie de la Communauté des Libraires jusque vers la fin du xviie siècle, c’est en cherchant dans les registres des maîtrises et des apprentissages ou dans les nombreux recueils d’actes divers de cette corporation, conservés parmi les manuscrits de la Bibliothèque nationale et figurant tous au catalogue, que nous avons trouvé les documents les plus sûrs et les plus intéressants.

La Caille et Lottin s’étaient déjà servi de ces archives[1], mais tous les deux, sans se préoccuper spécialement des relieurs, les confondirent simplement avec les autres membres de la communauté, négligence d’autant plus regrettable, surtout pour le premier de ces auteurs, qu’à la date où il terminait son livre, il lui aurait été facile de s’édifier exactement sur ceux qui de son temps, ou un peu avant, pratiquèrent la reliure et la dorure ; nous aurions alors des renseignements bien difficiles à remplacer aujourd’hui !

La Bibliothèque de la ville de Paris, établie Hôtel Carnavalet,

s’enrichit, il y a quelques années, de quantité de cartons, remplis de pièces de toutes sortes, provenant des anciens procureurs de la Communauté des Libraires et Relieurs, fonds précieux, dune authenticité indiscutable, auquel s’ajoutent, pour le xviiie siècle, les tableaux officiels que les Relieurs et Doreurs de livres, désormais seuls et séparés des Libraires, publiaient chaque année. Cet établissement, ainsi que quelques amateurs, en conservent plusieurs rares exemplaires qu’ils ont bien voulu nous communiquer avec empressement.

Nous-même avons heureusement acquis beaucoup d’arrêts, de sentences, de mémoires et de factums concernant notre sujet, dont il nous a été permis de compléter la collection par des copies prises avec soin dans les deux grands dépôts publics nommés plus haut.

L’importance et la sûreté de semblables sources d’informations n’échapperont à personne.

Tels sont les principaux éléments d’après lesquels nous avons écrit notre livre et qui nous ont servi à rétablir la vérité, assez peu respectée, on le sait, par nos devanciers.

Enfin, c’est en étudiant depuis quinze ans, avec la plus scrupuleuse attention, les belles reliures à notre portée dans les bibliothèques publiques et chez les amateurs où il nous a été possible de pénétrer, de même qu’en suivant avec un intérêt soutenu les ventes des collections célèbres faites ces dernières années, que nous croyons avoir réussi à nous créer une opinion raisonnée sur les changements de styles amenés par la mode ou à la suite d’innovations dues à des maîtres de talent.

Nous ne nous dissimulons pas que bien des noms de relieurs d’une habileté douteuse grossissent notre volume sans grande utilité pour la bibliophilie ; cependant, comme en dehors des artistes très connus, il y en eut d’autres dont les mérites sont restés ignorés, il nous a semblé, qu’au risque d’augmenter quelque peu notre liste, il fallait y faire figurer tous les noms venus à notre connaissance. L’amateur découvrant un maître, qui jusqu’alors lui aura été inconnu, ne sera-t-il pas bien aise de se procurer des indications biographiques, ou même seulement quelques jalons propres à le renseigner sur cette nouvelle personnalité se présentant à lui ?

Le lecteur remarquera que nous nous sommes fait un devoir de reconnaître, chaque fois que l’occasion nous en a été donnée, le gracieux concours que bien des personnes nous ont apporté dans notre travail ; nous ne saurions toutefois nous dispenser de terminer ces quelques mots d’avertissement sans exprimer de nouveau ici toute notre gratitude à M. le baron J. Pichon, à M. O. Thierry Poux, de la Bibliothèque nationale, à MM. Jules Cousin et Lucien Faucou, de la Bibliothèque Carnavalet ; ces Messieurs, en effet, se sont toujours très cordialement mis à notre disposition, et n’ont cessé de nous encourager dans nos recherches avec la plus entière bienveillance.


  1. La Caille, Histoire de l’Imprimerie et de la Librairie, où l’on voit son origine et son progrès, jusqu’en 1689. Paris, 1689, in-4o. — Lottin, Catalogue chronologique des Libraires et des Libraires-Imprimeurs de Paris. Paris, 1789, petit in-8o.