Les Sceptiques grecs/Livre II/Chapitre VI

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Impr. nationale (p. 209-226).

CHAPITRE VI.

ANTIOCHUS D’ASCALON.


Nous avons achevé l’histoire de la nouvelle Académie. Antiochus d’Ascalon, qui nous est présenté par les historiens, et se présentait lui-même comme un académicien, ne mérite ce titre que si on l’entend au sens primitif du mot : il appartient peut-être, c’est du moins sa prétention, fort peu justifiée, comme on le verra, à l’ancienne Académie ; il n’appartient pas à la nouvelle : il en est l’ennemi déclaré ; il le dit lui-même dans le Lucullus où visiblement Cicéron reproduit ses propres paroles[1].

Pourtant, l’histoire de la philosophie d’Antiochus est à un double titre l’épilogue nécessaire de l’histoire de la nouvelle Académie. D’abord Antiochus a pendant assez longtemps fait partie de l’école de Philon. Plus tard il s’en sépara, et dirigea contre elle, de nombreuses et graves objections. L’historien a tout à gagner à ne pas substituer son propre jugement à celui d’un contemporain des doctrines qu’il expose : l’œuvre toujours si délicate de la critique lui est épargnée ; du moins il peut devenir critique sans cesser d’être historien. Enfin, on n’aurait d’une doctrine qu’une connaissance incomplète si on ignorait les objections auxquelles elle a donné lieu. Voilà pourquoi nous étudierons aussi la philosophie d’Antiochus, en nous attachant principalement aux points par où elle tient encore à celle de la nouvelle Académie.

I.  Antiochus naquit à Ascalon[2] vers[3] 124-127 av. J.-C. Il eut pour maîtres le stoïcien Mnésarque[4] et surtout Philon, dont il suivit les leçons pendant fort longtemps[5]. Nous ne savons si, après avoir quitté Athènes, il vint à Rome ; mais nous le retrouvons plus tard à Alexandrie, avec Lucullus, en l’an 87 suivant les uns, 84 suivant les autres[6]. Vers 79, lorsque Cicéron, pendant la dictature de Sylla, jugea prudent de quitter Rome, et alla passer six mois à Athènes, Antiochus y enseignait avec éclat[7] : il était le chef incontesté de l’Académie. Enfin, il accompagna encore Lucullus en Syrie et assista à la bataille de Tigranocerte[8] (69 av. J.-C.). Il mourut peu de temps[9] après, en Mésopotamie, à la suite des fatigues de la campagne[10].

Cicéron, sans partager toutes les opinions d’Antiochus, avait pour lui beaucoup d’affection et d’admiration[11]. Il vante l’aménité de son caractère, la finesse de son esprit, l’éclat de sa parole ; c’est sans doute la douceur de son éloquence qui l’avait fait surnommer le cygne[12]. Les amitiés illustres que le philosophe sut gagner et conserver, celles d’Atticus, de Lucullus, de Brutus, de Varron, attestent que Cicéron ne l’a pas jugé avec trop de faveur.

Nous connaissons les titres de plusieurs ouvrages d’Antiochus : le Sosus[13] d’abord, qu’il écrivit pour répondre à Philon, dans l’accès de colère que lui avaient donné les assertions de son maître sur l’identité de la nouvelle Académie et de l’ancienne[14] : il protestait avec énergie contre cette confusion, et revendiquait pour lui-même, pour les dogmatistes, pour les stoïciens, le titre d’Académicien. Sextus[15] cite aussi un passage d’un livre d’Antiochus intitulé Κανονικά : sans doute il y traitait les questions de logique ; nous voyons qu’il y mentionnait l’opinion du célèbre médecin Asclépiade, d’après laquelle les choses sont connues par les sens, et nullement par la raison. C’est peut-être le livre que Cicéron avait sous les yeux en écrivant le Lucullus : cependant, comme il ne nomme que le Sosus, il est naturel de croire qu’il s’est plutôt servi de ce dernier ouvrage[16].

Dans un autre livre, adressé à Balbus[17], Antiochus soutenait qu’entre les péripatéticiens et les stoïciens, il n’y a qu’une différence de mots. Enfin Plutarque[18] nous parle d’un livre Περὶ θέων qu’il avait écrit dans les derniers jours de sa vie, puisque c’est là qu’il parlait de la bataille de Tigranocerte. Indépendamment de ces ouvrages qui appartiennent à la seconde partie de sa vie, Antiochus en avait écrit dans sa jeunesse d’autres, où il défendait les idées de Philon[19]. Mais nous n’avons pas de renseignements sur ces premiers essais, et sans doute ils furent de bonne heure oubliés.

Pourquoi Antiochus s’est-il séparé avec tant d’éclat de ses anciens amis ? Ses adversaires ne manquèrent pas de mettre cette défection sur le compte de son ambition : on disait qu’il était resté fidèle à son maître jusqu’au jour où il eut à son tour des disciples : il voulait être chef d’école, avoir ses disciples qui fussent appelés Antiochiens[20]. Nous n’avons aucune raison de nous associer à ces accusations, dictées peut-être par le dépit : les thèses de Philon n’étaient pas tellement évidentes (et lui-même avait varié) qu’il fût interdit à ses disciples d’en proclamer l’insuffisance et de les abandonner. Cicéron est-il plutôt dans le vrai lorsqu’il dit qu’Antiochus ne pouvait résister aux objections unanimes de tous les philosophes ? Quoi qu’il en soit, à partir de ce moment il se donna une double tâche : réfuter les doctrines de la nouvelle Académie, et en reprenant quelques-unes des idées de l’ancienne, lui opposer un dogmatisme rajeuni.


II. Le réquisitoire d’Antiochus contre les académiciens était certainement la partie principale de son enseignement, son œuvre de prédilection[21]. Il apportait dans la discussion une ardeur extrême, faisant face à ses adversaires sur tous les points, ne négligeant aucun détail, les poursuivant partout avec une verve infatigable, une dialectique souple et animée, et il faut le dire, parfois victorieuse.

Il n’hésitait[22] pas à rendre justice aux qualités de ses anciens maîtres : il reconnaissait qu’ils procédaient avec méthode, divisaient bien les questions, les discutaient à fond. Il ne songeait même pas à leur reprocher, comme sans doute on l’avait fait plus d’une fois, la subtilité de leurs analyses et de leurs définitions : rien de plus digne, à son gré, des véritables philosophes. Il n’estimait pas non plus que le dédain fût une réponse suffisante à une doctrine qui nie la possibilité de la connaissance : hausser les épaules et passer outre, sous prétexte qu’on défend une doctrine aussi claire que le jour, lui paraissait une réfutation insuffisante. Le sujet vaut la peine d’être étudié pour lui-même ; et si l’évidence se défend elle-même, il arrive pourtant qu’on se laisse prendre à certains prestiges, qu’on soit embarrassé par des questions subtiles et captieuses : il faut avoir la réponse prête, être armé de manière à repousser toutes les attaques. Examinons donc les thèses des académiciens.

Tout d’abord, c’est à tort qu’ils s’abritent derrière les noms des grands philosophes, de Parménide, d’Empédocle, de Démocrite, de Socrate et de Platon. À quelques exceptions près, ces philosophes, bien loin de dire qu’ils ne savaient rien, ont affirmé bien plus qu’ils ne savaient. Et si parfois ils ont hésité, depuis qu’ils ne sont plus, l’esprit humain n’a-t-il donc pu découvrir aucune vérité ? Socrate et Platon, en tous cas, ne doivent pas être mis au nombre de ceux qui doutent : Platon, parce qu’il a laissé un système achevé de toutes pièces ; Socrate, parce qu’il ne faut pas se méprendre sur la modestie avec laquelle il s’efface dans les discussions : c’est pure ironie, et il ne songe qu’à surprendre son adversaire.

Considérons à présent les conséquences où conduit la doctrine académique. Aucune représentation, dit-on, n’est infaillible. Mais chacun de nous, à chaque instant, donne un démenti à cette assertion. Ne nous attardons pas à discuter l’argument de la rame plongée dans l’eau, ou du cou de la colombe : les couleurs que nous voyons, les sons que nous entendons, les parfums que nous respirons nous inspirent une pleine confiance. Et si on conteste la légitimité de la sensation, le jugement, le raisonnement, la mémoire deviennent impossibles : comment se rappeler des choses fausses, des choses que l’esprit n’a point saisies, et qu’il ne tient pas ? Avec la mémoire, l’art disparaît. Que deviendra le géomètre, s’il ne peut discerner rien de certain ? Comment le musicien pourrait-il jouer en mesure, ou suivre la marche des vers ? Enfin, chose plus grave, la vertu est rendue impossible. Trouvera-t-on des hommes de bien, décidés à braver tous les tourments plutôt que de trahir leur devoir, si les raisons de cette obligation ne sont point connues, perçues, comprises, fixées avec une inaltérable certitude ? L’action, même la plus simple, suppose des idées arrêtées, des croyances. On n’agit pas sans désir : et comment délibérer quand on ignore si la chose désirée est bonne ou mauvaise, conforme ou non à la nature ? Plus de raison, plus de philosophie, plus de ces principes (δόγματα) qu’on ne peut trahir sans crime ; plus d’amitié, plus de patriotisme.

Laissons de côté les conséquences d’ordre pratique, et envisageons la question au point de vue théorique. Les académiciens disent : rien n’est certain. Mais cette assertion même, avouent-ils qu’elle est certaine ? Non, répondait Carnéade à Antipater qui lui faisait cette objection. Celui qui dit : rien n’est certain, ne fait aucune exception ; cette proposition n’est que probable. Il n’y a point de philosophie, réplique Antiochus, qui n’ait une opinion sur ces deux points : le souverain bien ou la règle des mœurs, et la distinction du vrai et du faux. Quand on se donne pour philosophe, quand on veut enseigner aux autres ce qu’ils doivent faire et éviter, croire ou rejeter, il faut avoir un principe. Le principe des académiciens est que rien n’est certain : il faut donc qu’ils s’en tiennent à ce principe, qu’ils lui soient fidèles ; en d’autres termes, qu’ils soient certains.

Ainsi serrés de près, les académiciens répondent : Est-ce notre faute, si rien n’est certain ? Prenez-vous-en à la nature qui a, suivant l’expression de Démocrite, caché la vérité au fond d’un abîme. Abandonnons les sceptiques, dont il faut désespérer, et pour lesquels tout est aussi incertain que la question de savoir si le nombre des étoiles est pair ou impair. D’autres sont plus adroits : ils distinguent ce qui ne peut être connu, et ce qui est incertain. Il y a suivant eux des choses qui, sans pouvoir être connues ou saisies, sont claires : ils accordent qu’il y a de la probabilité, de la vraisemblance ; c’est là, disent-ils, qu’ils trouvent une règle pour l’action et pour la pensée.

Mais comment distinguer ce qui est probable ou vraisemblable de ce qui ne l’est pas, s’il n’y a aucun signe distinctif de la vérité ? Entre les représentations vraies et les fausses, il n’y a pas, dites-vous, de différence spécifique. Dès lors, de quel droit dire que les unes se rapprochent de la vérité, que les autres s’en éloignent ? Elles sont toutes également suspectes. C’est se moquer de dire qu’en nous enlevant le moyen de connaître la vérité, on nous laisse la vérité elle-même. Dites à un aveugle qu’en lui ôtant la vue on ne lui a pas ôté ce qui peut être vu !

On commet la même erreur quand on reconnaît des choses évidentes (perspicua) mais qui ne sauraient être perçues. Comment dire qu’une chose est évidemment blanche, s’il peut arriver que le noir paraisse blanc ? Comment dire d’une chose qu’elle est évidente ou finement gravée dans l’esprit, quand on ne sait si, oui ou non, l’esprit en a reçu l’impression ?

Qu’est-ce donc que la probabilité ? Appellerez-vous probable la première impression qui s’offre à vous ? L’accueillerez-vous du premier coup ? Quoi de plus téméraire ? Ne l’admettrez-vous qu’avec circonspection et après un examen attentif ? Mais quand vous l’aurez retournée de toutes façons, vous dites qu’il pourra encore se faire qu’elle soit fausse : quelle confiance aurez-vous donc en elle ? Quoi de plus absurde que de dire : voici la marque, la preuve qui me fait admettre cette assertion ; il est bien possible pourtant qu’elle soit fausse.

Considérée dans la formule générale qui l’exprime, la thèse des nouveaux académiciens ne peut se soutenir : examinons à présent les arguments de détail qu’on invoque en sa faveur.

Avec les stoïciens, on distingue plusieurs sortes de représentations. Les divisions sont admirables : les définitions fines et exactes. Mais quoi ! n’est-ce pas là le langage d’hommes qui ont des opinions arrêtées ? Ces merveilleuses définitions, une fois formulées, peut-on les appliquer indifféremment à n’importe quoi ? Si oui, comment dire qu’elles sont justes ? Si non, il faudra bien convenir qu’il y a des objets auxquels seuls elles conviennent, et qu’on le sait. Et comment ne pas voir une contradiction éclatante entre ces deux propositions, expressément admises par les académiciens : Il y a des représentations fausses. Entre les représentations vraies et les fausses, il n’y a point de différence spécifique. En admettant la première, vous niez la seconde ; en proclamant la seconde, vous détruisez la première.

Analysons avec soin le fait même de la représentation. La représentation est un état de l’âme, mais un état qui en même temps qu’il est connu nous fait connaître aussi ce qui la produit. Je vois un objet : en le voyant, je me trouve dans un état différent de celui ou j’étais l’instant d’auparavant, et je connais deux choses : cet état même, et ce qui l’a provoqué. La lumière se révèle en faisant voir les objets qu’elle éclaire : il n’en peut être autrement de la représentation[23].

Mais, objecte-t-on, si la représentation doit toujours avoir un objet, d’où vient qu’il y a des représentations fausses exactement semblables aux vraies ? On va alors chercher les fantômes du rêve, les illusions de l’ivresse, les hallucinations de la folie. Laissons de côté le sorite qui permet de passer insensiblement de l’apparence trompeuse à l’impossibilité de distinguer le vrai du faux[24]. C’est un sophisme : il pourrait tout aussi bien servir à prouver que les loups sont des chiens. Ce qu’il faut opposer obstinément à tous ces exemples, c’est qu’ils n’offrent pas le véritable caractère de l’évidence. Dans le sommeil ou dans l’ivresse, les images n’ont pas la même netteté que dans la veille : on hésite, on tâtonne, on doute, et le fou, revenu à lui-même, se hâte de dire : mon cœur n’est pas d’accord avec mes yeux. Et ne faut-il pas vouloir tout confondre pour aller chercher de tels exemples ? Nous voulons savoir où est la sagesse, la lucidité, le sérieux : on nous parle de fous, d’endormis, ou d’ivrognes. La seule conclusion qu’on puisse légitimement tirer de tous ces faits, c’est que pour connaître la réalité, les sens doivent être en bon état. Nous nous assurons que cette condition est remplie en changeant la situation des objets que nous regardons, en modifiant la lumière qui les éclaire, en augmentant ou diminuant l’intervalle qui nous en sépare. Ces précautions prises, nous pouvons juger en toute sûreté.

Que dire enfin de ces ressemblances dont on mène si grand bruit, entre deux jumeaux, deux œufs, deux cheveux ? Ces ressemblances, tout le monde les reconnaît : mais pourquoi en conclure l’identité des objets semblables ? Vous ne distinguez pas deux jumeaux ? Chez eux, leur mère les distingue fort bien : l’habitude aidant, vous les distingueriez aussi. On a vu à Délos des gens qui, à la seule inspection d’un œuf, pouvaient reconnaître la poule qui l’avait pondu. Et à raisonner ainsi, si toutes choses dans la réalité sont confondues et indiscernables, ce n’est pas seulement la connaissance, c’est l’existence même de la vérité qui devient impossible. La probabilité même disparaît : il faut en revenir avec Arcésilas à la suspension du jugement. Au fond, Arcésilas était bien plus conséquent avec lui-même que Carnéade.


III. C’est le dogmatisme stoïcien qu’Antiochus veut substituer au probabilisme de la nouvelle Académie[25]. En même temps, il est vrai, il se flatte de rester fidèle aux doctrines de Platon et d’Aristote, qu’il ne distingue pas l’une de l’autre.

Si on en juge par l’exposition que fait Varron, dans le Ier livre des Académiques de Cicéron, Antiochus divisait la philosophie, comme les stoïciens, en trois parties ; mais il attachait fort peu d’importance à la physique, et il avouait volontiers que les questions obscures et difficiles dont elle s’occupe donnent trop de prise à l’argumentation sceptique des académiciens. Les deux questions principales de la philosophie sont pour lui celle du critérium de la vérité, et la définition du souverain bien[26]. Dans l’exposition de Varron, la morale occupe la première place, la physique la seconde ; la logique ne vient qu’en troisième lieu.

En morale, Antiochus admettait la division de Carnéade[27]. Après avoir combattu et exclu toutes les autres solutions, il se prononçait pour celle des stoïciens. Le souverain bien est de vivre conformément à la nature : la nature propre de l’homme est la raison ; l’homme doit donc se conformer à la raison. La vertu est pour lui le souverain bien[28]. Jusqu’ici le Portique et l’Académie sont d’accord. Voici où ils se séparent. Dans l’homme, les stoïciens ne voient que la raison ; Antiochus tient compte de la sensibilité et du corps[29]. Sans doute, étant de nature inférieure, le corps doit être subordonné à l’esprit[30] ; mais le souverain bien implique le plein épanouissement du corps et de l’esprit, la possession des biens corporels autant que des biens spirituels. Le bonheur, par suite, implique aussi cette double condition. La vertu suffit au bonheur[31] : les stoïciens l’ont dit, et ils ont raison. Aristote, ou du moins Théophraste et son école sont à tort portés à exagérer l’importance des biens extérieurs[32]. Mais si la vie peut être heureuse grâce à la seule vertu, elle ne l’est parfaitement qu’à la condition que les biens extérieurs se joignent à la vertu : c’est ce que les stoïciens ont trop méconnu[33]. Antiochus, on le voit, rapproche et réunit, plutôt qu’il ne concilie, les vues divergentes des deux écoles : certainement elles ne sont pas aussi parfaitement d’accord entre elles qu’il lui plaît de l’affirmer, et Cicéron a raison de lui dire qu’entre l’une et l’autre il faut choisir[34]. Antiochus s’éloignait encore du stoïcisme en refusant d’admettre l’égalité de tous les péchés[35] et l’impassibilité absolue du sage[36].

La physique d’Antiochus admet deux principes, la force et la matière, qui ne peuvent exister l’un sans l’autre. La réunion de ces deux principes forme un corps, ou qualité (ωοιότ). De ces qualités, les unes, au nombre de cinq, sont simples et irréductibles : ce sont les éléments ; les autres sont composées, ce sont toutes les propriétés des corps. Sous la diversité de tous les corps subsiste l’unité de la matière primitive, divisible à l’infini, éternelle, indestructible, d’où tout est sorti, où tout doit rentrer. La réunion de tous ces corps forme l’univers, gouverné par une intelligence suprême, parfaite et éternelle : elle maintient l’ordre et l’harmonie : c’est la Providence. On l’appelle aussi Dieu, et parfois la Nécessité, parce que l’enchaînement qu’elle établit entre toutes les parties de l’univers est immuable et fatal.

Antiochus expose cette doctrine comme étant commune à Platon et à Aristote : c’est manifestement une erreur. Cette physique panthéiste est exclusivement stoïcienne : le désaccord entre l’ancienne Académie et le stoïcisme est ici encore incontestable.

En logique, Antiochus expose assez exactement la théorie platonicienne de la connaissance. Toute connaissance a pour point de départ les sens, mais c’est à la raison qu’il appartient de discerner la vérité. Les sens sont faibles, imparfaits ; ils ne perçoivent pas les choses qu’ils paraissent connaître. On ne voit pas bien comment Antiochus conciliait cette théorie avec celle de la représentation compréhensive qu’il admettait avec les stoïciens : Cicéron dit d’ailleurs qu’il ne s’est jamais écarté des traces de Chrysippe[37]. Tout au moins, il abandonnait la théorie des idées de Platon, et Cicéron a raison quand il constate ce désaccord[38]. Il est possible, comme le remarque Zeller[39] qu’il ait concilié Aristote et les stoïciens en déclarant que la vérité réside dans les concepts formés par la raison a l’aide des données sensibles. Il reste néanmoins certain qu’Aristote attribuait à la raison un rôle tout différent de celui que lui laissent les stoïciens ; ici encore Antiochus n’a pu réunir deux doctrines en réalité fort différentes, qu’en faisant violence à l’une d’elles : nous retrouvons partout le même éclectisme, sans discernement et sans profondeur.

IV. Des deux parties de l’œuvre philosophique d’Antiochus, c’est, ainsi qu’il arrive si souvent, la partie négative ou destructive qui, de beaucoup, lui fait le plus d’honneur. Son dogmatisme ne témoigne d’aucune originalité. Il se borne à répéter, sans les approfondir, les assertions des stoïciens : il lui suffit de les atténuer quelquefois, et d’adoucir quelques paradoxes insoutenables. S’il invoque la grande autorité de Platon et d’Aristote, c’est presque toujours à contresens : il altère et affaiblit leur doctrine, pour la mettre d’accord avec celle des stoïciens, et cet accord est lui-même de pure apparence.

En revanche, sa critique de la nouvelle Académie ne manque ni de finesse ni de force. Du moins on peut dire que les adversaires du probabilisme n’ont jamais trouvé d’autres arguments que les siens.

Toutefois, la critique d’Antiochus serait bien plus décisive si, à Carnéade et à Philon, il opposait autre chose que le dogmatisme sensualiste des stoïciens. Antiochus a peut-être raison ; mais il ne donne pas de bonnes raisons. Très fort dans l’attaque, il devient très faible lorsqu’il s’agit de substituer une thèse positive à la thèse sceptique qu’il combat. L’objection des académiciens contre la représentation compréhensive, si nous ne nous trompons, subsiste tout entière. Que répondre à cet argument de Carnéade : si, comme le soutiennent les stoïciens, la représentation compréhensive correspond exactement à son objet, deux objets différents doivent provoquer des représentations spécifiquement distinctes. Or, l’expérience prouve qu’il n’en est rien : à chaque instant, des objets différents provoquent des représentations identiques. C’était là le nœud de la difficulté : Antiochus a eu au moins le mérite de le comprendre, car il consacrait des journées entières à la discussion de ce point. Mais ses arguments, tels du moins qu’ils ont été conservés par Cicéron, ne résolvent pas la difficulté [40]. On y sent de l’embarras et de l’indécision : la nouvelle Académie reste victorieuse : c’est à vrai dire du sensualisme qu’elle triomphe. C’est moins sans doute la faute d’Antiochus que celle de la doctrine qui lui était commune avec les stoïciens. À n’invoquer que le témoignage des sens, à s’enfermer dans l’empirisme, Berkeley et Hume l’ont bien prouvé plus tard, il est impossible de fonder une solide théorie de la certitude.

V. Quelles furent, après Philon et Antiochus, les destinées de la nouvelle Académie ? Il semble bien que dans l’ardent débat qui s’engagea entre le maître et le disciple, ce dernier eut l’avantage. La manière dont Cicéron[41] nous dit : Philone vivo, academiœ patrocinium non defuit, n’indique-t-elle pas qu’une fois Philon disparu, l’Académie n’eut plus de défenseur ? C’est d’ailleurs ce qu’atteste expressément le même Cicéron quand il dit que l’Académie est abandonnée[42]. qu’en Grèce même elle ne trouve plus de partisans[43]

Toutefois, il faut faire ici une distinction. L’Académie n’eut plus de représentants à Athènes : c’est que Philon, qui avait quitté la Grèce au temps de la guerre de Mithridate, n’y retourna plus[44]. Elle en eut à Rome : Cicéron d’abord, puis Cotta[45] peut-être[46] P. et C. Selius et Tetrilius Rogus. Mais il ne fallait pas compter sur les Romains pour donner à des idées grecques un développement original.

La nouvelle Académie eut aussi des adeptes à Alexandrie, qui était devenue dès cette époque la capitale philosophique de la Grèce. Cicéron nous parle en effet d’Héraclite de Tyr, disciple de Philon en même temps qu’Antiochus[47], qui tint bon jusqu’au bout en faveur des doctrines de son maître, et combattit Antiochus avec une douceur obstinée. C’est probablement à lui que Cicéron fait allusion quand il dit que la doctrine de Philon, prope dimissa, revocatur.

Peut-être faut-il aussi compter parmi les disciples fidèles de Philon, Eudore d’Alexandrie. Du moins, il nous est donné[48] comme académicien. Nous savons de lui qu’il avait écrit un livre où il examinait πρωβληματικῶς toutes les questions philosophiques, ce qui signifie probablement[49] qu’il exposait toutes les opinions à la façon académique, sans se prononcer, et en laissant aux lecteurs le soin de conclure. Cependant, nous voyons qu’il avait écrit un commentaire[50] sur les Catégories d’Aristote et peut-être sur la Métaphysique[51] : vraisemblablement aussi[52] il avait expliqué le Timée de Platon. Tout cela donne à penser que nous avons affaire à un éclectique. Enfin un passage qu’Arius Didymus lui emprunta, et que Stobée[53] nous a conservé, indique, par son allure stoïcienne, qu’il avait fait plus d’une concession au Portique. C’est peut-être à lui que pensait Ænésidème quand il reprochait aux académiciens de n’être plus que des stoïciens aux prises avec des stoïciens.

À côté d’Eudore, il faut placer cet Arius Didymus, auquel Stobée[54] a emprunté tout le viie chapitre des Ἐκλόγαι. Ce philosophe est le même[55] qui fut l’ami intime d’Auguste et de Mécène[56], qui adressa une Consolation à Livie[57], et contribua par son amitié avec Octave à sauver Alexandrie, sa patrie[58].

Zeller a remarqué avec raison que son exposition de la morale péripatéticienne a une couleur stoïcienne : Arius va même jusqu’à employer des expressions purement stoïciennes pour traduire les idées morales de Platon et d’Aristote[59]. Toutefois, cette raison ne serait peut-être pas décisive pour le ranger parmi les stoïciens ; car les anciens ne se piquaient pas toujours d’une scrupuleuse exactitude historique, et Arius a pu, tout en voulant ne faire qu’une œuvre d’historien, se servir d’expressions familières et plus connues de son temps pour exprimer des idées plus anciennes. De plus, s’il est très souvent d’accord avec Antiochus[60], on peut aussi citer nombre de points où il est en contradiction avec lui[61].

La question serait difficile à résoudre, si la découverte de l’Index Laurentianus[62] n’était venue couper court à tout débat. Nous voyons en effet que Diogène range expressément Arius parmi les stoïciens, et le place entre Antipater de Tyr et Cornutus[63].

La nouvelle Académie a donc bien fini avec Philon, tout au plus avec Eudore. Antiochus triomphe décidément. Il eut d’ailleurs un grand nombre de disciples, à Rome, Varron et Lucullus, Brutus[64] ; à Alexandrie, son frère Aristus[65], Ariston et Dion[66], finalement Arius Didymus, bien d’autres encore dont nous n’avons plus à nous occuper, puisqu’ils n’appartiennent plus à la nouvelle Académie.

Ainsi, le stoïcisme s’établit définitivement sur les ruines de l’Académie. Il est vrai que c’est à la suite d’un compromis, signé par Antiochus, qui réconcilie Zénon et Platon. La paix a été conclue aux dépens de Philon, et l’Académie a acheté son unité en rejetant hors de son sein cette tradition idéaliste et sceptique qu’elle avait si longtemps essayé de concilier avec les exigences de la morale et de la vie pratique. Cette tradition était pourtant authentiquement platonicienne ; et c’est une question de savoir si l’Académie a plus gagné que perdu en se dépouillant d’un élément, embarrassant il est vrai, mais qui avait sa valeur et sa dignité, et en tous cas tenait étroitement à ce qu’il y avait de meilleur dans le platonisme et l’aristotélisme. Au point de vue moral, sans aucun doute, Platon et Aristote sont plus près de Zénon que de Carnéade et de Philon. (Encore eussent-ils souscrit aux paradoxes stoïciens ?) C’est ce qui explique et justifie en un sens la victoire d’Antiochus. Mais jamais Platon et Aristote n’eussent admis le sensualisme étroit des stoïciens : c’est à condition de faire silence sur ce point, cependant capital, d’oublier quelques-unes de leurs croyances les plus chères, qu’on a pu les réconcilier avec les disciples de Zénon. C’est en sacrifiant l’idéalisme au sensualisme et à une sorte de matérialisme, qu’Antiochus a fait triompher la morale stoïcienne. Il est vrai que les éclectiques, qui adoucissaient tout, ont pu adoucir la rigueur stoïcienne, en même temps qu’ils tempéraient jusqu’à le supprimer l’idéalisme platonicien. C’est par des concessions réciproques que se font les compromis. Mais ce n’est pas par des compromis que se fait la philosophie.

Si donc il faut juger l’entreprise d’Antiochus, on se trouve dans un véritable embarras : ici encore, comme disaient volontiers les académiciens, il y a du pour et du contre. Il est vrai que cette longue série de philosophes, réunis par Antiochus sous le titre respecté de l’Académie et qui va de Socrate, Platon et Aristote, à Zénon et à Chrysippe, embrassant toutes les gloires de la philosophie ancienne, fait assez bonne figure. On ne peut s’empêcher pourtant de penser qu’entre des noms si divers, l’entente n’est qu’apparente, et comme de parade ; que tous ces philosophes, réunis à leur corps défendant, cesseraient aussitôt d’être d’accord, s’ils commençaient à s’expliquer, et que celui qui a signé le traité d’alliance en leur nom n’avait peut-être pas qualité pour les représenter. Peut-être aussi est-il permis d’avoir un regard de sympathie pour ces proscrits, que la défaite de l’idéalisme a définitivement exclus du chœur des philosophes, et qui porteront devant l’histoire la peine d’avoir trop courageusement combattu le sensualisme. Dans tous les cas, ce n’est pas dans cette mêlée de philosophes qu’on trouve le véritable et pur esprit[67] de l’ancienne Académie : il ne reparaîtra vraiment que quand renaîtra la métaphysique, dans l’école d’Alexandrie.


  1. Ac., II, iv, 12 : « …audirem Antiochum contra academicos (disserentem). » Cf. II, vi, 18.
  2. Strab., XVI, ii, 29. — Plut., Luc., 42. Cic., 4. Brut., 2. — Élien, V. H., xii, 25. — Stéphane de Byzance, cité par Fabricius, Biblioth. Gr., t. III, p. 537.
  3. Nous n’avons pas d’indications précises sur la date de la naissance d’Antio- chus ; mais lorsqu’il eut connaissance à Alexandrie des livres de Philon (Cic., Ac., II, iv, 11) en 86 ou 87 (voy. ci-dessus, p. 191), il était déjà séparé de son maître, dont nous savons (Cic., Ac., II, xxii, 69) qu’il avait suivi les leçons pendant de longues années. On ne se trompera pas de beaucoup, semble-t-il, en admettant qu’à cette époque Antiochus devait être âgé d’environ quarante ans : ce qui place sa naissance vers 124 ou 127 av. J.-C.. Chappuis, dont le livre (De Antiocha Ascalonitæ vita et doctrina, Paris, 1854) a été impudemment plagié par d’Allemand (De Antiocho Ascalonita, Marpurgi Cattorum, 1856) indique l’an 128.
  4. Numen. Ap. Euseb., Præp. Ev., XIV, ix, 3. Saint Augustin, Contra Academicos, III, xviii, 41. Cic., Ac., II, xxii, 69.
  5. Cic., Ac., II, xxii, 69.
  6. Cic., Ac., II, iv, 11 ; ii, 4 ; xix, 61.
  7. Cic., Brut., xci, 315. Ac., I, iv, 13 ; II, xxxv, 113. Leg., I, xxi, 54. Fin., V, i, 1. — Plut., Cic., 4.
  8. Plut., Luc., 28.
  9. Cic., Ac., II, xix, 61 : « …Hæc Antiochus, in Syria quum esset mecum, paulo ante quam est mortuus. »
  10. Ind. Herc., xxiv, 5.
  11. Ac., II, ii, 4 ; xxxv, 113.
  12. Stéph. de Byzance, l. c.
  13. Sosus est le nom d’un philosophe, compatriote d’Antiochus, et qui appartenait à l’école stoïcienne (Stéph. de Byzance, l. c.).
  14. Cic., Ac., II, iv, 11.
  15. Sext., M., VII, 201.
  16. Cf. Thiaucourt, op. cit., p. 58.
  17. Cic. De Nat. Deor., I, vii, 16.
  18. Luc., 28.
  19. Cic., Ac., II, xxii, 69.
  20. Cic., Ac., II, xxii, 70 : « … fore ut ei qui se sequerentur, Antiochi vocarentur. »
  21. Cic., Ac., II, vi, 18. Augustin. Cont. academic., II, vi, 15.
  22. Nous empruntons tous les renseignements qui vont suivre au Lucullus de Cicéron, passim.
  23. Sext., M., VII, 162.
  24. Cic., Ac., II, xvi, 49.
  25. Cic., Ac., II, xliii, 132 : « …(Antiochus) qui appellabatur Academicos, erat quidem, si perpauca mutavisset, germanissimus stoicus. »
  26. Ac., II, ix, 29 : « Etenim duo esse hæc maxima in philosophia, judicum veri, et finem bonorum. »
  27. Voy. ci-dessus, p. 158. Cic. Fin., V, vi, 16.
  28. Cic. Fin., V, ix, 26. Pison expose la doctrine d’Antiochus, Fin., V, iii, 8.
  29. Ac., I, v, 19. Cf. Fin., V, xiii, 37 ; xiv, 40 ; xvii, 47.
  30. Cic. Fin., V, xii, 34.
  31. Cic., Ac., I, vi, 22 : « In una virtute esse positam beatam vitam, nec tamen beatissimam, nisi adjungerentur et corporis, et cetera, quæ supra dicta sunt, ad virtutis usum idonea. » Cf. Cic., Ac., II, xliii, 134. Fin., V, xxiv, 71 ; xxvii, 81.
  32. Cic. Fin., V, v, 12. Ac., I, x, 35.
  33. Cic. Fin., V, xxiv, 72.
  34. Ac., II, xliii, 132.
  35. Cic., Ac., II, xliii, 133.
  36. Cic., Ac., II, xliv, 133.
  37. Ac., II, XLVI, 143.
  38. Ibid.
  39. Op. cit., IV, 603. 3e Aufl.
  40. Cic., Ac., II, XVI, 49.
  41. Ac., II, VI, 17.
  42. Ac., II, IV, 11.
  43. De N. D., I, V, 11.
  44. Cic, Tusc., V, XXXVII.
  45. De N. D., I, VII, 16
  46. Cic., Ac., II, IV, 11.
  47. Ac., II, iv, 11. Cf. Ind. Herc., xxxiii (ab imo), 4, où peut-être il est indiqué comme ayant vécu soixante-dix ans.
  48. Stob., Ecl., II, 48. Cf. Röper, Philolog., VII, 534.
  49. Zeller (IV, 612) interprète autrement ce mot. Hirzel (III, p. 247) combat, avec raison selon nous, cette interprétation.
  50. Simplic., Schol. in Arist., 61, a, 25.
  51. Alex. Metaph., XLIV, 23.
  52. Plut., De anim. procr. in Tim., 3.
  53. Ecl., II, 48. Voy. Thiaucourt, De Stob. Ecl. earumque fontibus, c. 1, p. 58. Paris, Hachette, 1885.
  54. Thiaucourt, ibid., 56.
  55. Ce point a été contesté (Heine, Jahrbuch für class. Philol., 1869), mais à tort. (V. Diels Doxog.-Græc., p. 86.) En revanche, il faut distinguer Arius de Δίδυμος Ἀτήϊος dont parle Suidas. (Zeller, op. cit., p. 615, 2.)
  56. Élien, Var. Hist., xii, 25.
  57. Un fragment en a été conservé par Sénèque, Cons. ad Marc., 4.
  58. Plut., Præc. ger. reip., xviii, 3. Reg. Apoph., Aug., iii, 5. Anton., 80. Suét., Octav., 89.
  59. Thiaucourt, op. cit., p. 59.
  60. Zeller, p. 616, 1.
  61. Hirzel, op. cit., II, p. 713, 695 ; III, p. 244. Hirzel, qui veut à toute force faire d’Eudore et d’Arius des continuateurs de Philon, remarque avec raison qu’Arius témoigne envers Philon d’une grande admiration (Stob., II, 40) et qu’il semble connaître et citer Platon bien mieux qu’Antiochus, qui ne le connaissait que de seconde main (p. 242). Mais tous ces arguments tombent, semble-t-il, devant le texte formel de l’Index Laurentianus, dont Hirzel ne parle pas. Cf. Diels Dox. Gr., p. 81.
  62. Val. Rose, Hermès, I, 370.
  63. C’est d’ailleurs ce que confirme Sénèque, Quæst. nat., VII, xxxii, 2 : « Academici et veteres, et minores, nullum antistitem reliquerunt. »
  64. Cic., Brut., xcvii, 332. Ac., II, iii, 12. Fin., V, iii, 8. Tusc., V, viii, 21.
  65. Cic., Ac., II, iv, 12 ; I, iii, 12, etc.
  66. Cic., Ac., II, iv, 12.
  67. Saint Augustin ne s’y est pas trompé. S’il a eu tort, comme nous l’avons montré, de prêter aux nouveaux académiciens de secrets dogmes platoniciens, il a bien vu du moins qu’ils étaient, à bien des égards, plus près du véritable esprit platonicien que leurs rivaux stoïciens. Antiochus est à ses yeux une sorte de traître, qui a livré la place à l’ennemi. Contr. academic., III, xviii, 41 : « (Antiochus) in Academiam veterem, quasi vacuam defensoribus et quasi nullo hoste securam, velut adjutor et civis irrepserat, nescio quid inferens mali de stoicorum cineribus quod Platonis avita violaret…