Lettres d’anoblissement accordées à Jehanne la Pucelle et à sa famille

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Lettres d’anoblissement accordées à Jehanne la Pucelle et à sa famille
Éditions de la Revue Héraldique (p. 4-6).

« Charles, par la Grâce de Dieu, Roi de France pour perpétuelle mémoire. À cette fin de glorifier les très abondantes et insignes faveurs dont le Très-Haut nous a comblé, et que, nous l’espérons, sa divine miséricorde daignera nous continuer, par le moyen et le concours éclatant de la Pucelle, notre chère et bien aimée Jeanne d’Arc, de Domrémy, au baillage de Chaumont ou dans son ressort, et pour célébrer à la fois les mérites de ladite Pucelle et les louanges divines, nous estimons convenable et opportun de l’élever, elle et toute sa parenté, aux honneurs et dignités de notre majesté royale, de sorte que, illustrée par la grâce divine, elle laisse à sa race un souvenir précieux de notre royale libéralité, et que la gloire de Dieu, ainsi que la renommée de tant de bienfaits se perpétue et s’accroisse dans tous les siècles. C’est pourquoi nous faisons savoir à tous, présents et à venir, que, eu égard à ce que dessus, considérant en outre les agréables, nombreux et recommandables services que Jeanne la Pucelle a déjà rendus et rendra à l’avenir, nous l’espérons, à nous et à notre royaume, et pour autres certaines causes à ce nous mouvant, nous. avons anobli ladite Pucelle, Jacques d’Arc, du dit lieu de Domrémy, et Isabeau sa femme, ses père et mère, Jacquemin et Jean d’Arc et Pierre Pierrelot, ses frères, et toute sa parenté et lignage, et, en faveur et contemplation d’icelle Jeanne, toute leur postérité mâle et femelle, née, et à naître, en légitime mariage, et par des présentes, de notre grâce spéciale, certaine science et pleine puissance, les anoblissons et déclarons nobles ; voulant que ladite Pucelle, les dits Jacques, Isabeau, Jacquemin, Jean et Pierre, et toute la postérité et lignage de ladite Pucelle, ainsi que les enfants d’eux, nés et à naître, soient par tous tenus et réputés nobles, dans leurs actes, en justice et hors justice, et qu’ils jouissent et usent paisiblement des privilèges, franchises, prérogatives et autres droits dont sont accoutumés de jouir, en notre royaume, les autres nobles, extraits de noble lignée, lesquels et leur dite postérité nous faisons participer à la condition des autres nobles de notre royaume, nés de noble race, nonobstant qu’ils n’aient, comme dit est, une origine noble, et qu’ils soient peut-être d’autre condition que de condition libre. Voulant aussi que les susnommés, ladite parenté et lignage de la Pucelle, et leur postérité mâle et femelle puissent, quand et toutes fois qu’il leur plaira, obtenir et recevoir de tout chevalier les insignes de la chevalerie. Leur permettant, en outre, à eux et à leur postérité tant masculine que féminine, née et à naître en légitime mariage, d’acquérir des personnes nobles et autres quelconques tous fiefs arrière-fiefs et biens nobles, lesquels, acquis ou à acquérir pourront et leur sera permis avoir, tenir et posséder à toujours, sans qu’ils puissent être contraints, maintenant ni au temps à venir, à s’en dessaisir par faute de noblesse. Pour lequel anoblissement ils ne seront tenus ni forcés de payer aucune finance à nous ni à nos successeurs ; de laquelle finance, en considération et regard de leurs ancêtres, nous avons de pleine grâce fait don et remise aux susnommés et à ladite parenté et lignage de la Pucelle, et par les présentes leur en faisons don et remise, nonobstant toutes ordonnances, statuts, édits, usages, révocations, coutumes, inhibitions et mandements, faits ou à faire, à ce contraires. Pour pourquoi nous faisons savoir à tous, présents et à venir, que, en quoi, nous donnons en mandement par lesdites présentes à nos amés et féaux, les gens de nos comptes, aux trésoriers généraux et commissaires ordonnés ou à ordonner sur le fait de nos finances, et au bailli dudit baillage de Chaumont, et à nos autres justiciers ou leurs lieutenants présents et à venir et à chacun d’eux, en tant qu’il lui appartiendra, qu’ils fassent et laissent ladite Jeanne la Pucelle, et leur postérité susdite, née et à naître, comme dit est, en légitime mariage, jouir et user paisiblement de nos présente grâce, anoblissement et octroi, maintenant et au temps à venir, sans leur faire ni souffrir qu’il leur soit fait aucun trouble ni empêchement contre la teneur des présentes. Et pour que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous avons fait apposer aux présentes notre sceau en l’absence de notre grand sceau, sauf entre autres choses notre droit et le droit d’autrui en toutes. Donné à Meun-sur-Yèvre, au mois de décembre, l’an du Seigneur mil quatre cent vingt-neuf, et de notre règne le huitième.

Sur le repli : Par le Roi, l’évêque de Seez, les Srs de la Trémoille, de Trèves et autres présents. Signées ALLIERE et scellées sur lacs de soie rouge et verte du grand sceau de cire verte.

Et plus bas : Expédiée en la chambre des Comptes du Roi, le seizième du mois de janvier, l’an du Seigneur mil quatre cent vingt-neuf et y enregistrée au livre des Chartes du temps, folio CXXI. Signé : AGRELLE. »