Marie-Claire/9

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Eugène Fasquelle (p. 34-35).



Bonne Néron s’en alla un jour après une scène, au milieu du déjeuner, alors qu’il régnait un grand silence. Elle cria tout à coup :

— Oui, je veux m’en aller, et je m’en irai !

Comme sœur Marie-Aimée la regardait tout étonnée, elle lui fit face en baissant la tête, qu’elle secouait et lançait en avant, criant plus fort qu’elle ne souffrirait pas plus longtemps d’être commandée par une morveuse, oui, une morveuse.

Elle était arrivée à reculons près de la porte ; elle l’ouvrit tout en donnant de furieux coups de tête, et avant de disparaître, elle lança son grand bras dans la direction de sœur Marie-Aimée et, avec un profond mépris, elle dit :

— Ça n’a pas seulement vingt-cinq ans !

Quelques petites filles étaient terrifiées ; d’autres éclatèrent de rire. Madeleine eut une véritable crise de nerfs ; elle se jeta aux genoux de sœur Marie-Aimée en lui enlaçant les jambes et en embrassant sa robe. Elle lui prit les mains, qu’elle frotta contre sa grosse bouche humide ; tout cela, en poussant des cris, comme si une catastrophe épouvantable était arrivée.

Sœur Marie-Aimée n’arrivait pas à se dégager ; elle finit par se fâcher. Alors, Madeleine s’évanouit en tombant sur le dos.

Tout en la dégrafant, sœur Marie-Aimée fit un signe de mon côté. Croyant qu’elle avait besoin de mes services, j’accourus. Mais elle me renvoya :

— Non, pas toi, Marie Renaud.

Elle lui remit ses clefs, et bien que Marie Renaud ne fût jamais entrée dans la chambre de sœur Marie-Aimée, elle trouva tout de suite le flacon demandé.