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Exemple
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MÉLANGES MÉMOIRE[1] Ceux qui sont instruits, à Paris, des manœuvres de M. de Maupertuis contre M. de Mairan et d’autres philosophes ne doivent pas être étonnés de sa conduite envers M. Koenig et envers moi. J’avais toujours fait gloire d’avouer que je devais beaucoup aux conseils de M. de Maupertuis, lorsque j’étudiai la physique newtonienne, alors très-peu connue en France : je l’en remerciai publiquement, et je lui payai le tribut de louanges que je pensais lui devoir. Il ne crut apparemment ni le tribut assez fort, ni assez digne de lui : car, lorsque je fus reçu à l’Académie française, il se plaignit vivement à moi que je ne l’eusse pas comparé, dans mon discours, à Platon[2] voyageant chez Denys de Syracuse ; et je fus même étonné, lorsque j’arrivai à Berlin, de trouver plusieurs personnes instruites de ce fait. Il avait voulu, avant de quitter l’Académie de Paris, faire dépouiller M. de Mairan de la place de secrétaire perpétuel, pour la partager avec moi. Il me la fit proposer par M. de Maurepas. Il prenait pour

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lui, comme de raison, toutes les parties de mathématique, et il m’abandonnait la physique et les éloges. On sent bien que c’eût été le partage du lion, qu’il aurait bientôt tout pris pour lui, et que je n’aurais été que son sous-secrétaire. M. de Maurepas et ses amis savent que je ne donnai pas dans ce piège. Je ne connais point la politique en fait de littérature ; je ne connais que l’indépendance et le travail. Ce qui est étrange, c’est que je suis venu chercher ce travail et cette indépendance même à la cour d’un roi ; et, ce qui est encore plus rare, c’est que je les y ai trouvés. J’ai passé près de deux années entières dans ma chambre, uniquement occupé de mes études, ne faisant aucune visite, ne rendant pas même mes devoirs aux reines et aux princes, ne sachant pas les noms des grands officiers de la couronne ni de la plupart des ministres, et ayant soupé, pendant des mois entiers, à la table du roi, avec des personnes dont le nom m’est encore absolument inconnu. Il n’a pas été malaisé de calomnier auprès du roi un homme qui, par cette vie solitaire, s’était privé lui-même de tous les moyens de se défendre. On peut croire qu’une pension très-considérable, quelques distinctions inusitées accordées à ma mauvaise santé, et surtout l’honneur que j’avais de voir de plus près qu’un autre les travaux littéraires dans lesquels le roi se délasse des travaux du gouvernement, on peut croire, dis-je, que tout cela ensemble a excité un peu de jalousie. On sait combien il est aisé, dans une cour, de faire parvenir à l’oreille du prince un mot qui peut intéresser son amour-propre. L’art de nuire sans se compromettre n’est pas un art nouveau, et il n’y a pas grand mérite à le mettre en œuvre ; mais on a beau être savant dans cet art de lancer des traits et de retirer la main, on ne peut pas toujours la retirer si vite qu’elle ne soit aperçue. De tous les artifices que Maupertuis a mis en usage pour me perdre, je choisirai celui-ci, dont la découverte et l’authenticité ne souffrent ni doutes ni réplique : Lettre[3] du sieur La Beaumelle à M. Roques, ministre au pays de Hesse-Hombourg : novembre 1752. « Maupertuis vint chez moi... il me dit qu’un jour, au souper des petits appartements, M. de Voltaire avait parlé d’une manière violente contre moi ; qu’il avait dit au roi que je parlais peu

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respectueusement de lui dans mon livre ; que je le comparais aux petits princes allemands, et mille faussetés de cette force. Maupertuis me conseilla d’envoyer mon livre au roi, en droiture, avec une lettre qu’il vit et corrigea lui-même, etc., etc... » Je n’examine point si M. de La Beaumelle avait eu tort ou raison de dire, dans son livre intitulé Mes Pensées, édition de Berlin, page 49 : « Le roi de Prusse comble de bienfaits des hommes à talent, précisément par les mêmes principes que les princes d’Allemagne comblent de bienfaits un bouffon et un nain. » Il suffit de faire voir ce que c’est qu’un philosophe, un président d’une académie, qui, au sortir d’un souper particulier avec le roi son maître, court chez un jeune inconnu à peine arrivé à Berlin, et manque au secret qu’il doit, pour nuire à un des convives. Une telle conduite n’est assurément ni philosophe ni chrétienne ; mais ce qui l’était encore moins, c’est que la calomnie était jointe à l’infidélité. Ce n’était pas moi qui avais parlé, à souper, des éloges que La Beaumelle donnait, dans son livre, au roi et aux officiers de sa chambre ; c’était le marquis d’Argens qui le dit en plaisantant. Ce dernier sait que je voulus l’arrêter, et que je lui dis, en propres paroles[4] : Taisez-vous donc, vous révélez le secret de l’église. J’ose prendre le roi à témoin que je ne dis pas un seul mot de ce que Maupertuis m’impute. Il m’a persécuté sans relâche par de tels artifices, tandis que j’étais uniquement occupé, loin de ma patrie, du monument que je voulais élever à sa gloire. Enfin est venue l’affaire de M. Koenig, mon ami et le sien. L’adresse et la violence qu’il a employées pour l’opprimer sont connues de toute l’Europe littéraire. Funeste ressource que l’adresse dans une dispute mathématique ! Il n’a pas aperçu l’erreur où il était tombé, erreur reconnue aujourd’hui par toutes les académies de l’Europe ; et au lieu de corriger cette méprise, ce qui lui était si aisé, ce qui lui aurait fait tant d’honneur ; au lieu de remercier M. Koenig, son ancien ami et le mien, qui avait fait le voyage de la Haye à Berlin uniquement pour en conférer avec lui, il l’a fait condamner comme faussaire, dans une assemblée de l’Académie ; il a intéressé, il a compromis les puissances les plus respectables, dans cette persécution inouïe. Ce n’est pas tout ; M. de Maupertuis a dicté lui-même l’accusation et la sentence, et a porté encore l’art de la vengeance jusques

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au point de vouloir paraître modéré et clément, dans le temps qu’il opprimait son adversaire, ou plutôt son ami, par une sentence flétrissante. Il demanda sa grâce à l’Académie par une lettre ; il affecta de ne point paraître au jugement qu’il avait dicté. Il est vrai qu’il n’y eut aucune délibération, aucune signature. Personne n’osa parler, hors un professeur nommé M. Sulzer[5] qui protesta hautement contre un procédé si inouï. Le secrétaire de l’Académie même[6], tout dépendant qu’il était de Maupertuis, fut trois jours sans signer cette sentence odieuse. M. de Maupertuis ne se contenta pas de ce cruel triomphe ; il écrivit lettres sur lettres à Mme la princesse d’Orange, à laquelle M. Koenig a l’honneur d’être attaché. Il le poursuivit jusque dans cet asile ; il eut l’audace de prier cette princesse de lier les mains à son conseiller, tandis qu’il le perçait de coups ; et, dans la noire profondeur de cette vengeance, il ne manquait pas d’avertir Son Altesse Royale des ménagements extrêmes qu’il avait eus pour M. Koenig. « Ma seule modération, dit-il dans une de ses lettres, lui a épargné l’affront d’une peine académique. » M. Koenig garda longtemps le silence, et j’avoue que moi-même, trompé par les apparences, je le crus coupable. Il n’est pas étonnant que le roi ait pensé de même, après un jugement qui paraissait si solennel, et lorsque tout conspirait avec le silence de M. Koenig pour induire le public en erreur. Enfin l’Appel au public parut, et l’Europe littéraire fut détrompée. Presque tous les académiciens de Berlin avouèrent que cet ouvrage était victorieux. M. Koenig me l’envoya ; j’en fus frappé comme de la plus vive lumière. Tous les philosophes d’Allemagne, de Paris et de Londres, sans exception, jugèrent en faveur de M. Koenig, pour le fond et pour la forme, et tous les lecteurs, aussi sans exception, justifièrent son innocence, si violemment persécutée et si injustement flétrie. Ce fut, et c’est encore le cri général. C’est un grand malheur que cet Appel au public n’ait pas été lu par Sa Majesté ; Maupertuis ne l’aurait pas compromise comme il a fait. Dans ce temps-là il fit imprimer ses Lettres, ouvrage

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singulier, par lequel il croyait mettre le sceau à sa réputation et ajouter un nouveau triomphe à la victoire qu’il s’imaginait avoir remportée sur M. Koenig. En effet, le sceau a été mis à sa réputation par cet écrit, où les hommes les moins éclairés ont été en état de juger des lumières de M. de Maupertuis. Il n’y a pas eu deux voix sur cet ouvrage rare. Je crus être en droit de dire mon avis. Je crus qu’un livre jugé ridicule par tout le monde ne méritait pas d’être réfuté sérieusement. J’ai déplu en cela au roi, qui alors n’était aucunement informé de ce que je viens de dire. J’espère que, quand il le sera, il me rendra la justice qui m’est due, et qu’un homme tel que lui, capable d’éclairer l’Europe sur bien des choses, jugera au moins comme elle en cette affaire. FIN DU MÉMOIRE.

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AVIS À L’AUTEUR DU JOURNAL DE GOTTINGUE [7] _________ Quand un journaliste veut rendre compte d’un ouvrage, il doit d’abord en saisir l’esprit ; quand il le critique, il doit avoir raison. Le journaliste de Gottingue a oublié entièrement ces deux devoirs, et il se trompe sans exception sur tout ce qu’il dit. Il se trompe quand il dit que l’auteur du Siècle de Louis XIV devait parler de Tillotson en parlant de Bourdaloue ; il ne songe pas qu’il ne s’agit que des écrivains de France. Il se trompe quand il dit que le baron des Coutures ne méritait pas d’être cité. Sa traduction de Lucrèce est la meilleure qu’on ait en France [8]. Il se trompe quand il dit que Desmarets n’était qu’un traducteur. L’abbé Régnier-Desmarets a traduit à la vérité Anacréon en vers italiens avec succès, ce qui est un très-grand mérite ; mais il a fait des vers français qu’on sait par cœur, et il était excellent grammairien. Il se trompe quand il dit que Bernier n’était pas médecin du Grand Mogol, et qu’il le croit précepteur du fils d’un aga. Un mahométan indien ne donne point pour précepteur à son fils un chrétien de France, qui parle mal indien ; mais on ne demande guère à un médecin de quelle religion il est. Bernier était médecin de l’empereur Sha-Géan [9], comme on peut le voir dès la

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page 9 de ses Voyages (édition d’Amsterdam). Voilà pourtant ce que le journaliste appelle une faute grossière. Il se trompe quand il dit que le Journal des Savants (de Paris) n’est pas le premier qu’on ait fait en Europe. Il se trompe en opposant les Transactions philosophiques. Ces Transactions ne sont point un examen des ouvrages nouveaux de tous les auteurs, comme le Journal des Savants ; c’est une entreprise toute différente. Il se trompe quand il croit qu’il y a eu une bonne pharmacopée universelle avant celle de Lémery. Il se trompe quand il dit que le Moréri n’est pas le premier dictionnaire français historique qui concerne les faits ; c’est même le premier en toute langue, ceux des Estienne[10] n’étant qu’une courte nomenclature pour l’intelligence des anciens auteurs. Il se trompe et fait pis que se tromper, quand il traite de menteur le P. Daniel, qui ne passe pas pour un historien assez profond et assez hardi, mais qui passe pour un historien très-véridique. Le P. Daniel a erré quelquefois, mais il n’est pas permis de l’appeler un menteur[11]. Il se trompe quand il croit les Contes badins de La Fontaine plus dangereux que la seconde églogue de Virgile, ou que certaines satires d’Horace, ou qu’Ovide, ou que Pétrone. Il n’a pas senti que la gaieté n’est pas ce qui inspire la volupté. La Fontaine est plaisant ; Ovide est voluptueux ; Pétrone est débauché. Il se trompe quand il reproche à l’auteur du Siècle de Louis XIV d’avoir dit qu’il vaut mieux recevoir cent bulles erronées que d’exciter des divisions. Voici le passage du Siècle : « Il vaut mieux recevoir cent bulles erronées que de mettre cent villes en cendres. » Quiconque aura une maison dans une de ces cent villes pensera ainsi ; permis à ceux qui n’ont point de maison de brûler celles des autres pour une bulle. Il se trompe quand il croit que dans le Siècle on immole les jansénistes aux jésuites. On n’a certainement point pris de parti entre ces messieurs. On y dit que Quesnel était un opiniâtre ; que le jésuite Le Tellier, confesseur de Louis XIV, était un

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méchant homme. L’auteur du Siècle n’est ni janséniste ni moliniste. Il se trompe quand il dit que les Français firent des campagnes malheureuses en Bohême, lorsque Louis XV fut à la tête de ses armées. Louis XV, depuis la fin de 1743, n’envoya pas en Bohême un seul régiment. Il se trompe quand il reproche à l’auteur du Siècle d’avoir dit que les Allemands ne se mettent jamais en campagne qu’au mois d’août. Jamais l’auteur du Siècle n’a répété cette ancienne sottise. Il se trompe quand il avance que les papes n’ont jamais rendu Castro et Ronciglione. Ils en sont possesseurs, oui ; mais cela prouve-t-il qu’ils ne les aient jamais cédés ? Alexandre VII fut forcé de les rendre pour cent mille écus romains en 1664. Il se trompe quand il dit que l’Encyclopédie n’est pas un ouvrage très-utile, et quand il conclut qu’il ne vaut rien, de ce qu’il a été critiqué et persécuté dans sa naissance par des ennemis intéressés. Il devait conclure tout le contraire. Il faudrait tâcher de ne se pas tromper sur tous les points quand on critique un ouvrage. L’auteur du Siècle de Louis XIV n’a vu aucune des éditions qui ont été faites en France, en Angleterre, et en Hollande. Il lui est tombé entre les mains une petite feuille volante, dans laquelle on relève plusieurs fautes de l’édition de la Haye, et on en rend l’auteur responsable. Il y a, ce me semble, un peu d’injustice dans ce procédé. Ce n’est pas à lui qu’il faut s’en prendre si on a imprimé Pigeri pour Gigeri, Burignac pour Daubignac, et si les éditeurs sont tombés dans d’autres méprises. On ne trouvera pas ces fautes dans l’édition de Genève, corrigée par l’auteur même. Ceux qui se hâtent de faire ces critiques devraient y apporter plus d’équité et plus d’attention. Par exemple, on reproche à l’auteur d’avoir dit que le grand Condé mourut à Chantilly en 1680. Cela n’est pas vrai : l’auteur place cette mort en 1686, non pas à Chantilly, mais à Fontainebleau[12]. On lui reproche d’avoir mis en 1700 la mort de Jacques II, roi d’Angleterre. Cela n’est pas vrai : il dit que c’est en 1701. On lui reproche d’avoir placé la mort de Madame, la première femme du frère de Louis XIV, en 1672. Cela n’est pas vrai : il la place au mois de juin 1670.

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On lui reproche d’avoir fait naître Mme Dacier en 1615. Cela n’est pas vrai : il a placé sa naissance en 1651. Au reste, il est difficile que, dans un catalogue de plus de trois cents artistes, on ne se soit trompé sur quelques noms obscurs, et sur quelques dates. Un errata suffit pour ces bagatelles. Il ne faut pas juger d’un grand bâtiment par quelques pavés qu’un maçon subalterne aura mal arrangés dans la cour. FIN DE L’AVIS, ETC. __________ SUPPLÉMENT AU SIÈCLE DE LOUIS XIV (1753) Cet ouvrage est dans le tome XV, à la suite du Siècle de Louis XIV. __________

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EXAMEN DU TESTAMENT POLITIQUE DU CARDINAL ALBÉRONI (1753[13]) Après tant de testaments cassés par le public, celui du cardinal Albéroni vient de paraître. Je souhaite à l’éditeur qu’en effet le cardinal Albéroni l’ait mis sur son testament. Cet éditeur, ou cet auteur, connaît sans doute assez les hommes, les affaires, et le train du monde, pour ne pas ignorer qu’un bon legs, qui procure une vie heureuse, vaut mieux que toutes les spéculations politiques. Un écrivain fait un beau livre plein de profonds raisonnements sur le commerce ruineux de l’Europe avec les Grandes Indes : un négociant d’un trait de plume y envoie, sans raisonner, des effets : il s’enrichit, et ne lit point le livre. Il en est de même dans la politique : l’homme d’esprit oisif fait des projets pour changer la face de l’Europe ; ceux qui gouvernent suivent leur routine, et ne s’informent pas seulement si on a fait des projets. L’abbé de Bourzeis, dans la crainte de n’être point lu, prit sans façon le nom du cardinal de Richelieu. D’autres ont pris le nom de Mazarin, de Colbert, de Louvois, du duc le Lorraine. Tous ces testaments sont faits dans le goût de celui de Crispin, qui prend la robe de chambre et le nom de Géronte dans le

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Légataire universel. On voit bien que ce n’est pas Géronte qui a fait ce testament-là ; on y reconnaît bien vite Crispin. Ce n’est pas un Crispin à la vérité qui a composé le testament du cardinal Albéroni : c’est un homme passablement instruit ; mais il faut qu’il se détrompe de la vanité de faire accroire que ce testament soit effectivement l’ouvrage du cardinal. Il a beau, dans sa préface, vouloir éluder la loi que j’ai fait valoir[14], que ce seul mot, Testament d’un ministre, impose le devoir indispensable de déposer dans des archives publiques l’original de l’ouvrage, ou d’en constater l’authenticité par des voies équivalentes ; cette loi ne peut être violée sans que le public soit en droit de crier à la supposition. Il est absolument nécessaire de montrer au public qu’on ne le trompe pas, quand il s’agit d’ouvrages de cette importance. Lorsque je fis imprimer à la Haye l’Anti-Machiavel, j’en déposai l’original à l’Hôtel de Ville, et il y est encore. Aussi l’auteur ne prétend pas que le Testament du cardinal Albéroni soit l’ouvrage de ce ministre ; il dit seulement que ce sont ses intentions ; que c’est un recueil de quelques pensées du cardinal, auxquelles l’éditeur a joint les siennes ; et par là c’est un ouvrage qui peut devenir doublement précieux. Qu’on l’appelle Testament ou non, il n’importe : les titres des livres sont comme ceux des hommes aux yeux du philosophe ; il ne juge de rien par les titres. Que ce soit le cardinal Albéroni, ou son truchement, qui propose au roi d’Espagne d’encourager l’agriculture, il est clair que c’est un très-bon avis, et qu’il faut le suivre, soit qu’il vienne d’un ministre ou d’un fermier. L’auteur propose de cultiver les terres espagnoles par des nègres. Pourquoi non ? ces terres, qui manquent de laboureurs, accusent encore le malheureux roi qui les priva des mains des Maures, sous lesquelles elles étaient fertiles. Les déserts de la Prusse cultivés par des étrangers sont un reproche aux terres de la Castille. Peu d’hommes connaissent mieux l’Espagne que l’auteur ; on croirait presque que c’est le ministre de Philippe V, ou celui qui a été le compagnon de sa retraite et son malheureux ami, si l’on peut être l’ami d’un roi. Il compte toutes les causes de la dépopulation de l’Espagne ; mais il me semble qu’il a tort de ne pas mettre parmi ces causes l’expulsion des juifs et des Maures, et les transplantations en Amérique. L’émigration des protestants est insensible en France. Oui, parce que la France possède environ vingt-deux millions d’habitants industrieux ; mais il n’y a guère

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  1. Ce Mémoire, attribué à Voltaire dans le temps où il en circula des copies à Paris, est bien certainement de lui. Il fut composé vers le moment ou Frédéric II se disposait à faire brûler la Diatribe du docteur Akakia par la main du bourreau, sur la place des Gens-d’Armes à Berlin (24 décembre 1752), et quelques jours avant que le philosophe-chambellan renvoyât au Salomon du Nord les grelots et la marotte dont le prince l’avait décoré : ce qui fixe la date dudit Mémoire à la seconde moitié de décembre 1752. La seule copie que je connaisse de cette pièce inédite (mai 1834) se trouve dans la bibliothèque cantonale de Lausanne, où M. Monnard, conservateur de ce dépôt littéraire, voulut bien me permettre d’en prendre communication, le 30 septembre 1825. Cette copie, qui n’est ni de la main de Voltaire ni de celle de Colini, fait partie des manuscrits possédés autrefois par Clavel de Brenles, l’un des correspondants de Voltaire. (Cl.)

    — Ce morceau se trouve dans l’édition de Beuchot, au tome L, page 614.

  2. Voyez la lettre du 3 juillet 1746, à Maupertuis.
  3. Un fragment plus considérable de cette lettre se trouve dans un autre mémoire de Voltaire, du 27 janvier 1753, tome XV, page 95.
  4. Voyez le second alinéa de la lettre à M. Roques, année 1752.
  5. Jean-George Sulzer (on prononce Soulzer), né en 1720 à Winterthur, canton de Zurich ; nommé membre de l’Académie des sciences de Berlin vers 1750, mort dans cette dernière ville en 1779, après y avoir été successivement professeur de mathématiques et de philosophie pendant plus de trente ans. (Cl.)
  6. C’était Formey. « Je ne laissais pas, dit-il dans ses Souvenirs (I, 183), de gémir en secret de l’incompétence du jugement qui fut rendu, et de plusieurs fausses démarches que la passion fit faire à M. de Maupertuis. » (B.)
  7. Cet opuscule, relatif au Siècle de Louis XIV, fut d’abord imprimé séparément, puis dans la Bibliothèque impartiale, tome VII, deuxième partie, page 316 (cahier de mars et avril 1753). Le journaliste de Gottingue répliqua par un Mémoire sur l’Avis, etc., qu’on trouve dans la Bibliothèque impartiale, tome IX, page 457, et tome X, page 123. Le Mémoire est quatre fois plus long que l’Avis. Les deux pièces font partie du volume intitulé Guerre littéraire, 1759, in-12. (B.)
  8. Depuis que Voltaire a écrit, ont paru la traduction en prose, par La Grange, et la traduction en vers, par M. Sanson de Pongerville. (B.)
  9. Sha-Gean était père d’Aurengzeb ; voyez tome XIII, pages 156 et suiv.
  10. Le Dictionarium historicum, geographicum et poeticum, de Charles Estienne, est de 1566, et est en latin. C’est, en grande partie, une traduction française de cet ouvrage que donna Juigné Broissinière, sous le titre de : Dictionnaire théologique, historique, etc, 1627, in-4o ; la première édition du Dictionnaire de Moréri est de 1673. (B.)
  11. Voyez, dans la Liste des écrivains, l’article Daniel, tome XIV ; et tome XI, pages 497 et 502.
  12. Voyez, tome XIV, pages 6 et 465, les préliminaires et le chapitre xxvii du Siècle de Louis XIV.
  13. Le Testament politique du cardinal Jules Albéroni, 1753, in-12, fut composé par Durey de Morsan, revu et publié par Maubert de Gouvest. L’Examen parut dans la Nouvelle Bigarrure, tome V, juillet 1753, pages 72-80. On peut donc croire qu’il a été écrit, pour le plus tard, en juin de la même année. Une réponse à l’Examen se trouve dans la préface de l’Histoire politique du siècle (par Maubert de Gouvest), 1754, deux volumes in-12, et, de l’aveu de Fréron, n’est qu’une invective burlesque. (B.)
  14. Voyez l’opuscule Des Mensonges imprimés, tome XXIII, pages 429 et 444.


Voir aussi
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