Odes (Horace, juxtalinéaire)

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Traduction par M. Taillefert.
Hachette (1p. 180-182).

ODE X.

À LICINIUS.

Tu vivras plus heureux, Licinius, si tu ne vas pas au loin sillonner la haute mer, et si, par une crainte excessive des tempêtes, tu ne rases pas de trop près les écueils du rivage. Celui qui chérit la médiocrité, plus précieuse que l’or, ne cherche point sa sûreté dans le honteux réduit de la misère, et, modéré dans ses désirs, fuit les palais qu’assiège l’envie. Le pin superbe est souvent battu par les vents ; les tours élevées tombent d’une chute plus pesante ; les plus hautes montagnes sont frappées de la foudre. Une âme mûrie par la sagesse espère dans l’adversité, et craint, dans la prospérité, un changement de fortune. Jupiter ramène les tristes hivers, mais Jupiter aussi les éloigne. Malheureux aujourd’hui, peut-être ne le seras-tu pas demain. Quelquefois Apollon réveille les cordes muettes de sa lyre, et son arc n’est pas toujours tendu. Montre-toi ferme et courageux dans l’infortune ; mais replie sagement tes voiles enflées par un vent trop favorable.