Page:Ésope - Fables - Émile Chambry.djvu/246

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d’ailleurs le pré où il se trouvait était meilleur ; car le gazon y était tout fleuri. Mais la chèvre lui répondit : « Ce n’est pas pour moi que tu m’appelles au pâtis, c’est pour toi qui n’as pas de quoi manger. »

Ainsi quand les scélérats exercent leur méchanceté parmi des gens qui les connaissent, ils ne gagnent rien à leurs machinations.



221


LE LOUP ET L’AGNEAU


Un loup, voyant un agneau qui buvait à une rivière, voulut alléguer un prétexte spécieux pour le dévorer. C’est pourquoi, bien qu’il fût lui-même en amont, il l’accusa de troubler l’eau et de l’empêcher de boire. L’agneau répondit qu’il ne buvait que du bout des lèvres, et que d’ailleurs, étant à l’aval, il ne pouvait troubler l’eau à l’amont. Le loup, ayant manqué son effet, reprit : « Mais l’an passé tu as insulté mon père. — Je n’étais pas même né à cette époque, » répondit l’agneau. Alors le loup reprit : « Quelle que soit ta facilité à te justifier, je ne t’en mangerai pas moins. »

Cette fable montre qu’auprès des gens décidés à faire le mal la plus juste défense reste sans effet.



222


LE LOUP ET LE JEUNE AGNEAU RÉFUGIÉ DANS UN TEMPLE


Un loup poursuivait un jeune agneau. Celui-ci se réfugia dans un temple. Comme le loup l’appelait à lui et disait que le sacrificateur l’immolerait au dieu, s’il le trouvait là : « Eh bien ! répondit l’agneau, je préfère être victime du dieu que de périr par toi. »

Cette fable montre que, si l’on est réduit à mourir, il vaut mieux mourir avec honneur.