Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/63

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cipe que les richesses sont les valeurs et que les valeurs se mesurent sur l’utilité. De ce principe fécond, il vous mène naturellement aux conséquences les plus éloignées, en sorte qu’en lisant cet ouvrage on est surpris, comme en lisant Laromiguière, de la facilité avec laquelle on va d’une idée à une idée nouvelle. Tout le système passe sous vos yeux avec des formes variées et vous procure tout le plaisir qui naît du sentiment de l’évidence.

Un jour que je me trouvais dans une société assez nombreuse, on traita, en manière de conversation, une question d’économie politique ; tout le monde déraisonnait. Je n’osais pas trop émettre mes opinions, tant je les trouvais opposées aux idées reçues ; cependant me trouvant, par chaque objection, obligé de remonter d’un échelon pour en venir à mes preuves, on me poussa bientôt jusqu’au principe. Ce fut alors que M. Say me donna beau jeu. Nous partîmes du principe de l’économie politique, que mes adversaires reconnaissaient être juste ; il nous fut bien facile de descendre aux conséquences et d’arriver à celle qui était l’objet de la discussion. Ce fut à cette occasion que je sentis tout le mérite de la méthode, et je voudrais qu’on l’appliquât à tout. N’es-tu pas de mon avis là-dessus ?



18 mars 1820.

… Je suis entré pas à pas dans le monde, mais je ne m’y suis pas jeté ; et, au milieu de ses plaisirs et de ses peines, quand les autres, étourdis par tant de bruit, s’oublient, si je puis m’exprimer ainsi, dans le cercle étroit du présent, mon âme vigilante avait toujours un œil en arrière, et la réflexion l’a empêchée de se laisser dominer. D’ailleurs mon goût pour l’étude a pris beaucoup de mes instants. Je m’y suis tellement livré, l’année dernière, que cette année on me l’a défendue, à la suite d’une incommodité douloureuse qu’elle m’a occasionnée…