Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/25

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II. — OBSTACLE, CAUSE.


L’obstacle pris pour la cause, — la disette prise pour l’abondance, — c’est le même sophisme sous un autre aspect. Il est bon de l’étudier sous toutes ses faces.

L’homme est primitivement dépourvu de tout.

Entre son dénûment et la satisfaction de ses besoins, il existe une multitude d’obstacles que le travail a pour but de surmonter. Il est curieux de rechercher comment et pourquoi ces obstacles mêmes à son bien-être sont devenus, à ses yeux, la cause de son bien-être.

J’ai besoin de me transporter à cent lieues. Mais entre les points de départ et d’arrivée s’interposent des montagnes, des rivières, des marais, des forêts impénétrables, des malfaiteurs, en un mot, des obstacles ; et, pour vaincre ces obstacles, il faudra que j’emploie beaucoup d’efforts, ou, ce qui revient au même, que d’autres emploient beaucoup d’efforts, et m’en fassent payer le prix. Il est clair qu’à cet égard j’eusse été dans une condition meilleure si ces obstacles n’eussent pas existé.

Pour traverser la vie et parcourir cette longue série de jours qui sépare le berceau de la tombe, l’homme a besoin de s’assimiler une quantité prodigieuse d’aliments, de se garantir contre l’intempérie des saisons, de se préserver ou de se guérir d’une foule de maux. La faim, la soif, la maladie, le chaud, le froid, sont autant d’obstacles semés sur sa route. Dans l’état d’isolement, il devrait les combattre tous

    des Harmonies économiques, puis, sous une autre forme, dans l’article Abondance, écrit pour le Dictionnaire de l’économie politique, et que nous reproduisons à la fin du 5e volume. (Note de l’éditeur.)