Page:Œuvres de Blaise Pascal, IV.djvu/468

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352 ŒUVRES

Si cela estoit arrivé loin d’icy, dans un tems éloigné du nôtre ; si on l’avoit apris de personnes suspectes, on pourroit en douter raisonnablement : mais Dieu a operé cette merveille de nos jours dans Paris, qu’on peut nommer la Capitale du Monde. La petite fille m’a raconté elle-même sa guerison : une Religieuse d’une naissance, et d’une vertu au dessus du commun, mon amie particuliere et mon alliée, m’a confirmé la chose : les Chirurgiens en ont fait leur rapport en forme : le Sieur Dalencé, l’un des plus grands hommes de notre siècle dans cette Profession m’en a assuré. Ceux qui l’ont connu peuvent rendre de luy ce témoignage, que son Esprit estoit également éloigné de superstition, et de duplicité. Il avoit esté un des principaux Consultans, et l’un de ceux qui avoient le plus examiné cette fistule. Il avoit vu la petite fille la veille du jour qu’elle fut guerie, jugeant toujours son mal incurable à moins d’y appliquer le feu ; et je luy entendis dire en presence d’un grand Prince, que cette guerison si promte ne luy paroissoit pas un moindre Miracle, que la resurrection d’un mort ; parce que les remedes les plus efficaces du monde n’auroient pù rien operer en si peu de tems ; et qu’il estoit impossible, que l’imagination la plus forte produisit cet effet prodigieux, beaucoup moins celle d’un enfant aussi simple qu’estoit cette petite fille.

VIII. — Recueil de plusieurs pièces pour servir à l’Histoire de P. R.... Utrecht, 1740.

p. 300... M. Paschal fut long-tems dans l’admiration, à l’occasion de ce Miracle ; et il avoit une raison d’en être encore plus touché que les autres 1 . Car il paroissoit que Dieu l’avoit accordé non seulement aux priéres et aux besoins de Port-

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1. Les réflexions que Pascal fit à ce sujet lui donnèrent la première idée de son Apologie, au dire de Madame Perier (cf. supra T. I. p. 73 sqq.). Cf. aussi toutes les pensées de Pascal sur les miracles (Pensées, section XIII, T. III, et surtout le fr. 841). — L’impression produite sur Saci fut aussi forte, cf. la citation de Fontaine que fait Sainte-Beuve, Port-Royal, 5 e édition, 1888, T. III, p. 185.