Page:Œuvres de Blaise Pascal, XII.djvu/39

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supprimé toutes les pensées qui lui paraissaient des « puérilités » et qu’on avait conservées pour « donner de la valeur à des misères scolastiques ou mystiques ». Il signale lui-même dans une note de sa Préface quelques unes de ces suppressions : elles portent en général sur des fragments auxquels Condorcet, comme Voltaire[1], ne pouvait attacher grande signification : « L’Ancien Testament contenait les figures de la joie future, etc… La charité n’est pas un précepte figuratif, etc… Les faiblesses les plus apparentes sont des forces à ceux qui prennent bien les choses : par exemple les deux généalogies de saint Mathieu et de saint Luc, etc… Les septante semaines de Daniel sont équivoques, etc… » Mais il y a deux de ces suppressions qu’il est curieux que Condorcet relève lui-même. La première porte sur un fragment que Voltaire avait vivement critiqué : « Croyez-vous qu’il soit impossible que Dieu soit infini, sans parties ? Oui. Je vous veux donc faire voir une chose infinie et indivisible. C’est un point, se mouvant partout d’une vitesse infinie ; car il est un en tous lieux et tout entier en chaque endroit[2]. » Et la seconde, qui est tout de même fâcheuse pour un éditeur de Pascal : « La distance infinie des corps aux esprits figure la distance infiniment plus infinie des esprits à la charité ; car elle est surnaturelle. »

Dans ces conditions le travail de Condorcet devait être un choix de pensées (suivant l’expression des premiers annotateurs de ses Œuvres complètes), plutôt qu’une édition proprement dite. Encore dans les passages qu’il conserve, Condorcet ne se soucie-t-il pas d’améliorer le

  1. Cf. Remarques du 10 mai 1743 à propos de la publication de Desmolets.
  2. Cf. fr. 231 et la note.