Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome premier, 1750.djvu/44

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I D A M A N T E.

Avez-vous dû parler ? Ai-je donc pu me taire ?
Près de l’objet enfin qui me cauſe mon ardeur,
Pouvais-je retenir tant d’amour dans mon cœur ?
Que dis-tu ? Toujours plein de cette ardeur extrême,
Le haſard ſans témoin m’offre tout ce que j’aime ;
Et tu veux de l’amour que j’étouffe la voix,
Libre de m’expliquer pour la première fois !
D’un attrait ſi puiſſant, eh ! Comment ſe défendre ?
Mon amour malheureux voulait ſe faire entendre…
Mais quel trouble inconnu remplit mon cœur d’effroi !
Cherchons dans ce palais à rejoindre le roi :
Allons. Bientôt la nuit, moins terrible & moins ſombre,
Va découvrir les maux qu’elle cachait dans l’ombre.
Ces lieux ſont éclairés d’un triſte & faible jour :
Égéſippe déjà doit être de retour.
Suis-moi : près de mon père il faut que je me rende.
Sachons, pour ſ’apaiſer, ce que le ciel demande.
Quel préſage ! Et qu’attendre en ces funeſtes lieux,
Si tout, juſqu’à l’amour, ſert le courroux des Dieux ?