Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome second, 1750.djvu/243

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P R O B U S.

Ainſi ne craignez rien. Seigneur, y penſez-vous ?
Songez que Romulus expira ſous leurs coups.
Je ne condamne point une noble aſſurance ;
Mais on n’en doit pas moins conſulter la prudence.
Plus le ſénat vous craint, plus il faut du ſénat
Craindre contre vos jours un ſecret attentat.

C A T I L I N A.

Non, Probus ; et je brave un péril qui vous glace.
Le ſuccès fut toujours un enfant de l’audace.
L’homme prudent voit trop, l’illuſion le ſuit ;
L’intrépide voit mieux, et le fantôme fuit ;
L’inſtant le plus terrible éclaire ſon courage,
Et le plus téméraire eſt alors le plus ſage.
L’imprudence n’eſt pas dans la témérité ;
Elle eſt dans un projet faux et mal concerté ;
Mais s’il eſt bien ſuivi, c’eſt un trait de prudence
Que d’aller quelquefois juſques à l’inſolence ;
Et je ſais, pour dompter les plus impérieux,
Qu’il faut ſouvent moins d’art que de mépris pour eux.
Adieu : dans un moment ils me verront paraître
En criminel qui vient leur annoncer un maître.