Page:Œuvres de Robespierre.djvu/141

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tation de Danton, Legendre demande que lui et ceux qui ont été arrêtés avec lui soient mandés à la barre et entendus : « J’ai le droit de craindre, dit-il, que des haines particulières et des passions individuelles n’arrachent à la liberté des hommes qui lui ont rendu les plus grands, les plus utiles services. Il m’appartient de dire cela de l’homme qui, en 1792, fit lever la France entière par les mesures énergiques dont il se servit pour ébranler le peuple ; de l’homme qui fit décréter la peine de mort contre quiconque ne donnerait pas ses armes ou n’irait pas en frapper l’ennemi. L’ennemi était alors aux portes de Paris : Danton vint, et ces idées sauvèrent la patrie. Je ne puis le croire coupable… » — Robespierre combat la motion de Legendre : « Il s’agit de savoir si quelques hommes aujourd’hui doivent l’emporter sur la patrie… Eh quoi ! n’avons-nous fait tant de sacrifices héroïques, au nombre desquels il faut compter ces actes d’une sévérité douloureuse ; n’avons-nous fait ces sacrifices que pour retomber sous le joug de quelques intrigants qui prétendaient dominer… Legendre parait ignorer les noms de ceux qui sont arrêtés : toute la Convention les sait. Son ami Lacroix est du nombre de ces détenus. Pourquoi feint-il de l’ignorer ? parce qu’il sait bien qu’on ne peut sans impudeur défendre Lacroix. Il a parlé de Danton, parce qu’il croit sans doute qu’à ce nom est attaché un privilège ; non, nous n’en voulons point de privilège ; non, nous n’en voulons point d’idoles ! (On applaudit à plusieurs reprises.) Nous verrons dans ce jour si la Convention saura briser une prétendue idole pourrie depuis longtemps ou si dans sa chute elle écrasera la Convention et le peuple français[1]. »

  1. Quelques semaines auparavant dans la séance du 3 décembre (13 brumaire) Robespierre aux Jacobins avait pris la défense de Danton avec beaucoup de chaleur et avait rendu un témoignage solennel à son patriotisme :

    « Danton, ne sais-tu pas que plus un homme a de courage et de pa-