Page:Œuvres de Robespierre.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Or, le moment est solennel, car on touche à l’heure où le pays doit décider de sa liberté ou de sa servitude, de son bonheur ou de sa misère. Tout, dit Robespierre, dépend du caractère et des principes des représentants chargés de régler les futures destinées de la patrie et du zèle que montrera le peuple pour recouvrer les droits sacrés et imprescriptibles dont il a été dépouillé. Il conseille donc vivement à ses concitoyens de secouer l’indolence habituelle, de dérober quelques instants à leurs plaisirs et à leurs affaires pour réfléchir mûrement sur leurs choix, sur la nature des vœux et des demandes à porter dans les comices « où la France allait se régénérer ou périr sans retour. »

Par cette brochure vigoureuse, Robespierre avait posé directement sa candidature, et il fut dès lors un des membres désignés pour les futurs états généraux. En mars 1789 il publia une nouvelle adresse Au peuple de l’Artois, par un habitant de la province, dans laquelle, sans solliciter directement les suffrages de ses concitoyens, il s’attachait à les éclairer sur leurs choix et définissait les qualités indispensables à un député de ce tiers état, riche en vertus et en talents, et sur lequel les autres ordres avaient la prétention de continuer leur injuste domination. S’il ne se croit pas un mérite suffisant pour représenter ses compatriotes, il croit pouvoir du moins leur donner de sages conseils et mettre au jour quelques idées utiles dans une aussi grave circonstance : « J’ai un cœur droit, une âme ferme ; je n’ai jamais su plier sous le joug de la bassesse et de la corruption… Si l’on a un reproche à me faire, c’est celui de n’avoir jamais su déguiser ma façon de penser, de n’avoir jamais dit : Oui, lorsque ma conscience me criait de dire : Non… ; de n’avoir jamais fait ma cour aux puissances de mon pays, dont je me suis toujours cru indépendant, quelques efforts que l’on ait tentés pour me persuader qu’il n’en coûte rien pour se présenter, en se courbant, dans l’antichambre d’un grand, que particulier l’on n’aime pas, que citoyen on dé-