Page:Œuvres de Robespierre.djvu/347

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dans l’oubli un héros plus jeune encore, et digne des hommages de la postérité ? Les Marseillais rebelles, rassemblés sur les bords de la Durance, se préparaient à passer cette rivière pour aller égorger les patriotes faibles et désarmés de ces malheureuses contrées : une troupe peu nombreuse de républicains, réunis de l’autre côté, ne voyait d’autre ressource que de couper les câbles des pontons qui étaient au pouvoir de leurs ennemis ; mais tenter une telle entreprise en présence des bataillons nombreux qui couvraient l’autre rive, et à la portée de leurs fusils, paraissait une entreprise chimérique aux plus hardis. Tout à coup, un enfant de treize ans s’élance sur une hache ; il vole au bord du fleuve, et frappe le câble de toute sa force : plusieurs décharges de mousqueterie sont dirigées contre lui ; il continue de frapper à coups redoublés ; enfin il est atteint d’un coup mortel ; il s’écrie : Je meurs, cela m’est égal, c’est pour la liberté ! il tombe, il est mort !… (Applaudissements réitérés.) Respectable enfant, que la patrie s’enorgueillisse de t’avoir donné le jour I Avec quel orgueil la Grèce et Rome auraient honoré ta mémoire, si elles avaient produit un héros tel que toi !

Citoyens, portons en pompe ses cendres au temple de la Gloire ; que la République en deuil les arrose de larmes amères ! Non, ne le pleurons pas ; imitons-le, vengeons-le par la ruine de tous les ennemis de notre République !

Toutes les vertus se disputent le droit de présider à nos fêtes. Instituons les fêtes de la gloire, non de celle qui ravage et opprime le monde, mais de celle qui l’affranchit, qui l’éclaire et qui le console ; de celle qui, après la patrie, est la première idole des cœurs généreux. Instituons une fête plus touchante, la fête du malheur : les esclaves adorent la fortune et le pouvoir ; nous, honorons le malheur ; le malheur, que l’humanité ne peut entièrement bannir de la terre, mais qu’elle console et soulage avec respect ! Tu obtiendras aussi cet hommage, ô toi qui jadis unissais les héros et les