Page:Œuvres de Robespierre.djvu/80

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fut pas moindre que celui des précédents : « Je ne viens pas vous occuper ici, quoiqu’on en puisse dire, disait-il dans son exorde, de l’intérêt de quelques individus, ni du mien. C’est la cause publique qui est l’unique objet de toute cette contestation. Gardez-vous de penser que les destinées du peuple soient attachées à quelques hommes ; gardez-vous de redouter le choc des opinions, et les orages des discussions politiques, qui ne sont que les douleurs de l’enfantement de la liberté. Cette pusillanimité, reste honteux de nos anciennes mœurs, serait-il l’écueil de l’esprit public et la sauvegarde de tous les crimes ? Élevons-nous, une fois pour toutes, à la hauteur des âmes antiques, et songeons que le courage et la vérité peuvent seuls achever cette grande révolution. Je suis calomnié à l’envi par les journaux de tous les partis ligués contre moi, je ne m’en plains pas, je ne cabale pas contre mes accusateurs ; j’aime bien que l’on m’accuse ; je regarde la liberté des dénonciations, dans tous les temps, comme la sauvegarde du peuple, comme le droit sacré de tout citoyen ; et je prends ici l’engagement formel de ne jamais porter mes plaintes à d’autre tribunal qu’à celui de l’opinion publique ; mais il est juste au moins que je rende un hommage à ce tribunal vraiment souverain, en répondant devant lui à mes adversaires. Je le dois d’autant plus que, dans les temps où nous sommes, ces sortes d’attaques sont moins dirigées contre les personnes que contre la cause et les principes qu’elles défendent. Chef de parti, agitateur du peuple, agent du comité autrichien, payé ou tout au moins égaré[1]. Si l’absurdité de ces inculpations me défend de les réfuter, leur nature, l’in-

  1. « Trois opinions partagent le public sur M. de Robespierre, écrivait Brissot dans le Patriote français (18 avril 1792) : les uns le croient fou, les autres attribuent sa conduite à une vanité blessée, une troisième partie le croit mis en œuvre par la liste civile. Nous ne croyons jamais à la corruption qu’elle ne soit bien prouvée. »