Page:Œuvres de Robespierre.djvu/85

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bins la lutte de Robespierre et des Girondins, il en est un qui est trop caractéristique pour qu’on puisse le passer sous silence. Dans la séance du 26 mars, Robespierre proposa une adresse aux sociétés patriotiques sur les événements qui venaient de s’accomplir. Guadet s’opposa à l’envoi de cette adresse, et parmi les motifs qu’il fit valoir se trouvait celui-ci : « J’ai entendu souvent, dans cette adresse, répéter le mot Providence, je crois même qu’il y est dit que la Providence nous a sauvés malgré nous. J’avoue que, ne voyant aucun sens à cette idée, je n’aurais jamais pensé qu’un homme qui a travaillé avec tant de courage, pendant trois ans, pour tirer le peuple de l’esclavage du despotisme, pût concourir à le remettre ensuite sous l’esclavage de la superstition. »

Voici en quels termes Robespierre répondit à ce reproche : « La superstition, il est vrai, est un des appuis du despotisme, mais ce n’est pas induire les citoyens dans la superstition que de prononcer le nom de la Divinité. J’abhorre, autant que personne, toutes ces sectes impies qui sont répandues dans l’univers pour favoriser l’ambition, le fanatisme et toutes les passions, en se couvrant du pouvoir sacré de l’Éternel qui a créé la nature et l’humanité ; mais je suis bien loin de la confondre avec ces imbéciles dont le despotisme s’est armé. Je soutiens, moi, ces éternels principes sur lesquels s’étaie la faiblesse humaine pour s’élancer à la vertu. Ce n’est point un vain langage dans ma bouche, pas plus que dans celle de tous les hommes illustres qui n’en avaient pas moins de morale, pour croire à l’existence de Dieu. (Plusieurs voix : — À l’ordre du jour ! — Brouhaha.) Non, messieurs, vous n’étoufferez pas ma voix, il n’y a pas d’ordre du jour qui puisse étouffer cette vérité : je vais continuer de développer un des principes puisés dans mon cœur, et avoués par tous les défenseurs de la liberté ; je ne crois pas qu’il puisse jamais déplaire à aucun membre de l’Assemblée nationale d’entendre ces principes, et ceux qui