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III
LA VIE DE SPINOZA.

paravant à cette fille d’un collier de perles de la valeur de deux ou trois cents pistoles contribuât sans doute à gagner ses bonnes grâces. Elle les lui accorda donc et lui promit de l’épouser, ce qu’elle exécuta fidèlement après que le sieur Kerkering eut abjuré la religion luthérienne, dont il faisait profession, et embrassé la catholique. On peut consulter sur ce sujet le Dictionnaire de M. Bayle, tome III, éd. 2, à l’article de Spinoza, à la page 2770 ; aussi bien que le Traité du docteur Kortholt De tribus Impostoribus, éd. 2, dans la préface.

À l’égard de Van den Ende, comme il était trop connu en Hollande pour y trouver de l’emploi, il se vit obligé d’en aller chercher ailleurs. Il passa en France, où il fit une fin très-malheureuse, après y avoir subsisté pendant quelques années de ce qu’il gagnait à sa profession de médecin. F. Halma, dans sa traduction flamande de l’article de Spinoza, page 5, rapporte que Van den Ende, ayant été convaincu d’avoir attenté à la vie de Mgr le dauphin, fut condamné à être pendu et exécuté. Cependant quelques autres qui l’ont connu très-particulièrement en France avouent, à la vérité, cette exécution, mais ils en rapportent autrement la cause. Ils disent que Van den Ende avait tâché de faire soulever les peuples d’une des provinces de France, qui, par ce moyen, espéraient rentrer dans la jouissance de leurs anciens priviléges ; en quoi il avait ses vues de son côté : qu’il songeait à délivrer les Provinces-Unies de l’oppression où elles étaient alors, en donnant assez d’occupation au roi de France en son propre pays pour être obligé d’y employer une grande partie de ses forces ; que c’était pour faciliter l’exécution de son dessein qu’on avait fait équiper quelques vaisseaux, qui cependant arrivèrent trop tard. Quoi qu’il en soit, Van den Ende fut exécuté ; mais s’il eût eu attenté à la vie du dauphin, il eût apparemment expié son crime d’une autre manière et par un supplice plus rigoureux[1].

  1. On trouve quelques détails sur la mort de Van den Ende dans un livre intitulé : Mémoires et réflexions sur les principaux événements du règne de Louis XIV par M. L. M. D. L. F. (Le marquis de La Fare). Rotterdam, 1716, p. 147. « Le chevalier de Rohan, perdu de dettes, mal à la cour, ne sachant où donner de la tête, et susceptible d’idées vastes, vaines et fausses, trouva un homme comme lui, hors qu’il avait plus d’esprit et plus de courage pour affronter la mort. C’était La Truaumont, ancien officier, qui espéra, se servant du chevalier de Rohan comme d’un fantôme, faire une grande fortune en introduisant les Hollandais en Normandie, d’où il était, et où il avait beaucoup d’habitudes. Le mécontentement des