Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/133

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bien que cet objet ne nous en ait jamais fait éprouver aucune autre, nous ressentons une passion semblable a la sienne.

Démonstration : Les images des choses, ce sont les affections du corps humain dont les idées nous représentent les corps extérieurs comme nous étant présents (par le Schol. de la Propos. 17, partie 2), en d’autres termes (par la Propos. 16, partie 2), dont les idées enveloppent à la fois la nature de notre corps et la nature présente du corps extérieur. Si donc la nature du corps extérieur est semblable à la nature de notre corps, alors l’idée du corps extérieur que nous imaginons enveloppera une affection de notre corps, semblable à l’affection du corps extérieur, et en conséquence, si nous nous représentons un objet qui nous est semblable comme affecté d’une certaine passion, cette représentation exprimera une affection semblable de notre corps ; et par suite, de cela seul que nous nous représenterons un objet qui nous est semblable comme affecté d’une certaine passion, nous éprouverons une passion semblable à la sienne. Que si nous haïssons cet objet qui nous est semblable, en tant que nous le haïssons, nous serons affectés (par la Propos. 23, partie 3) d’une passion contraire à la sienne, et non pas semblable. C. Q. F. D.

Scholie : Cette communication d’affection, relativement à la tristesse, se nomme commisération (voyez ci-dessus le Schol. de la Propos. 22, partie 3) ; mais relativement au désir, c’est l’émulation, laquelle n’est donc que le désir d’une chose produit en nous, parce que nous nous représentons nos semblables animés du même désir.

Corollaire I : Si nous nous représentons une personne, pour qui d’ailleurs nous n’éprouvons aucune passion, comme causant de la joie à un de nos semblables, nous aimerons cette personne ; si au contraire nous nous la représentons comme lui causant de la tristesse, nous la haïrons.

Démonstration : Cette Proposition se démontre par la précédente, comme la Propos. 22, partie 3, par la Propos. 21.

Corollaire II :