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DE L’ENTENDEMENT.

une voie par laquelle l’entendement, selon que sa capacité le comporte, pourra parvenir à la connaissance des choses éternelles, eu égard aux facultés dont il dispose.

Que s’il appartient à la nature de la pensée de former des idées vraies, comme on l’a montré dans la première partie, il faut ici demander ce que nous entendons par faculté et pouvoir de l’entendement. Or, puisque la principale partie de notre méthode est de bien comprendre les forces de l’entendement et sa nature, nous sommes nécessairement obligés (par ce que j’ai dit dans cette seconde partie de la méthode) de déduire tout cela de la définition même de la pensée et de l’entendement. Mais jusqu’ici nous n’avons eu aucune règle pour trouver les définitions ; et puisque nous ne pouvons exposer ces règles que si nous connaissons la nature, c’est-à-dire la définition de l’entendement et son pouvoir, il suit de là que la définition de l’intelligence doit être claire par elle-même, ou que nous ne pouvons rien comprendre. Cependant elle n’est pas absolument claire par elle-même ; mais de ce que ses propriétés, comme tout ce que nous tenons de l’entendement, ne peuvent être connues clairement et distinctement que si l’on en connaît la nature, la définition de l’entendement sera intelligible par elle-même si nous faisons attention à ses propriétés que nous connaissons clairement et distinctement. Énumérons donc ici les propriétés de l’entendement, examinons-les, et commençons à traiter de nos instruments naturels[1].

Les propriétés de l’entendement que j’ai principalement remarquées et que je comprends clairement sont les suivantes :

I. Il enveloppe la certitude, c’est-à-dire qu’il sait que les choses sont formellement telles qu’elles sont objectivement en lui-même.

II. Il perçoit certaines choses, c’est-à-dire qu’il forme

  1. Voyez ci-dessus, p. 303 et suiv.