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LETTRES.

LETTRE IV.

RÉPONSE À LA PRÉCÉDENTE
À MONSIEUR HENRI OLDENBOURG,
B. DE SPINOZA


Monsieur,

Au moment de partir pour Amsterdam, où je me propose de séjourner une ou deux semaines, je reçois votre lettre et j’y trouve vos objections aux trois propositions que je vous ai mandées. C’est à ces objections seules que je tâcherai de répondre, le défaut de temps me forçant de négliger les autres.

En ce qui touche la première, je conviens qu’en effet de la définition d’une chose quelconque on ne peut inférer l’existence de la chose définie ; cela n’est légitime (comme je l’ai démontré dans le Scholie que j’ai joint aux trois propositions) que pour la définition ou l’idée d’un attribut, c’est-à-dire, suivant ce que j’ai clairement expliqué en définissant Dieu, pour une chose qui est conçue par soi et en soi. Si je ne me trompe, j’ai aussi, dans ce même Scholie, assez clairement expliqué, surtout pour un philosophe, la raison de cette différence. Je suppose, en effet, qu’on n’ignore pas la différence qui existe entre une fiction de l’esprit et un concept clair et distinct, non plus que la vérité de cet axiome : que toute définition ou toute idée claire et distincte est vraie. Ces points une fois établis, je ne vois pas ce qu’on pourrait désirer encore pour la solution de la première difficulté. Je passe donc à la seconde. Vous paraissez accorder que si la pensée ne se rapporte point à la nature de l’étendue, alors l’étendue ne sera point terminée par la pensée ;