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LETTRES.

de la lymphe, du chyle, etc., se combinent, suivant les rapports de grandeur et de figure de ces parties, de façon qu’elles s’accordent ensemble parfaitement, et constituent par leur union un seul et même fluide, le chyle, la lymphe, etc., considérés sous ce point de vue, sont des parties du sang. Mais si l’on vient à concevoir les particules de la lymphe comme différant de celles du chyle sous le rapport du mouvement et de la figure, alors la lymphe n’est plus une partie du sang, mais un tout. Imaginez, je vous prie, qu’un petit ver vive dans le sang, que sa vue soit assez perçante pour discerner les particules du sang, de la lymphe, etc., et son intelligence assez subtile pour observer suivant quelle loi chaque particule, à la rencontre d’une autre particule, rebrousse chemin ou lui communique une partie de son mouvement, etc., ce petit ver vivrait dans le sang comme nous vivons dans une certaine partie de l’univers ; il considérerait chaque particule du sang, non comme une partie, mais comme un tout, et il ne pourrait savoir par quelle loi la nature universelle du sang en règle toutes les parties et les force, en vertu d’une nécessité inhérente à son être, de se combiner entre elles de façon à ce qu’elles s’accordent toutes ensemble suivant un rapport déterminé. Car, si nous supposons qu’il n’existe hors de ce petit univers aucune cause capable de communiquer au sang des mouvements nouveaux, ni aucun autre espace, ni aucun autre corps auquel le sang puisse communiquer son mouvement, il est certain que le sang restera toujours dans le même état et que ses particules ne souffriront aucun autre changement que ceux qui se peuvent concevoir par les rapports de mouvement qui existent entre la lymphe, le chyle, etc., et de cette façon le sang devra toujours être considéré, non comme une partie, mais comme un tout. Mais comme il existe en réalité beaucoup d’autres causes qui modifient les lois de la nature du sang et sont à leur tour modifiées par elles, il arrive que d’au-