Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/63

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que les autres à agir ou à pâtir simultanément d’un grand nombre de façons, il est uni à une âme plus propre à percevoir simultanément un grand nombre de choses ; et plus les actions d’un corps dépendent de lui seul, en d’autres termes, moins il a besoin du concours des autres corps pour agir, plus l’âme qui lui est unie est propre à la connaissance distincte. Et par là on peut connaître la supériorité d’une âme sur les autres, et apercevoir aussi pour quelle raison nous n’avons de notre corps qu’une connaissance très confuse, et plusieurs autres choses que je déduirai par la suite de celle-là. C’est pour cela que j’ai jugé convenable de les expliquer ici et de les démontrer avec plus de soin encore que je n’ai fait jusqu’à ce moment, et il est nécessaire, afin d’y réussir, de placer ici quelques notions préliminaires touchant la nature des corps.

Axiome 1

Tous les corps sont ou en mouvement ou en repos.

Axiome 2

Tout corps se meut, tantôt plus lentement, tantôt plus vite.

Lemme 1

Les corps se distinguent les uns des autres par le mouvement et le repos, la vitesse ou la lenteur, et non par la substance.

Démonstration : La première partie de ce lemme est de soi évidente ; quant à ce second point que les corps ne diffèrent point par la substance, il résulte des Propos. 5 et 8, part. 1, et plus clairement encore du Schol. de la Propos. 15, part. 1.

Lemme 2

Tous les corps ont quelque chose de commun.

Démonstration : Ils ont d’abord cela de commun qu’ils enveloppent tous le concept d’un seul et même attribut (par la Déf. 1, part. 2) ; et de plus, qu’ils peuvent tous se mouvoir, tantôt avec plus de vitesse, tantôt avec plus de lenteur, et, absolument parlant, tantôt être en mouvement, tantôt en repos.


Lemme 3

Un corps qui est en mouvement ou en repos a dû être déterminé au mouvement ou au repos par un autre