Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/31

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irrité, et il voulait connaître la cause qui avait troublé le repos de la maison.

« Noble sire, dit le franklin, un des plus formidables et des plus cruels cavaliers écossais de la frontière est près d’ici, et, ajouta-t-il avec un bégaiement causé par la terreur, on ne le voit jamais s’écarter si loin des montagnes sans de mauvaises intentions et sans la faculté de les accomplir. Ainsi, tenez-vous sur vos gardes, car… »

Là, un craquement épouvantable annonça que la porte avait été enfoncée ; le chevalier descendait alors l’escalier assez à temps pour empêcher un combat meurtrier entre sa suite et les brigands. Ceux-ci étaient au nombre de trois. Leur chef était grand, robuste, athlétique ; sa structure décharnée et musculaire, aussi bien que la dureté de ses traits, attestait que le cours de sa vie avait été fatigant et périlleux. Le costume dont il était revêtu ajouta encore à l’effet de son apparition ; il portait une jaque ou jaquette, faite avec un cuir de buffle très-épais et sur laquelle on avait cousu de petites plaques de fer en losange, appliquées l’une sur l’autre, et formant une cotte de mailles qui se ployait selon les divers mouvements du guerrier. Cette armure défensive couvrait un pourpoint de drap gris et grossier ; l’Écossais avait sur ses épaules quelques lames d’acier à demi rouillées ; une épée à deux tranchants et un poignard étaient pendus à son côté dans une ceinture de peau de buffle ; un casque garni de quelques barres en fer tenant lieu de visière, et une lance d’une longueur extraordinaire, complétaient son équipage. Les regards du guerrier étaient aussi durs et aussi farouches que son attirail ; ses yeux noirs et perçants ne restaient jamais un moment fixés sur le même objet, ils se portaient constamment sur tout ce qui se trouvait autour de lui, comme s’il eût cherché quelque danger à braver, quelque proie à saisir, et quelque insulte à venger. Ce dernier parti semblait être le seul objet qu’il eût en vue, car, sans avoir égard à la présence imposante de lord Lacy, il proféra les menaces les plus incohérentes contre le propriétaire de la maison et ses hôtes.

« Nous verrons, oui nous verrons si un chien d’Anglais doit accueillir et cacher ici les Southrons. Si je me suis abstenu de fréquenter ces lieux, rendez-en grâce à l’abbé de Melrose, et au bon chevalier de Coldingnow. Mais, par sainte Marie, ces jours sont passés, et vous vous en apercevrez. »