Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/64

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déclaré pour les Stuarts en 1715 et en 1745, et avait pris une part active à toutes les insurrections qui eurent lieu dans les Highlands durant ces mémorables époques ; et j’ai entendu dire qu’un de ses exploits les plus remarquables avait été le combat singulier qu’il soutint à l’arme blanche contre le célèbre Rob Roy Mac Gregor, au clachan de Balquidder.

Invernahyle était à Édimbourg lorsque Paul Jones se présenta à l’embouchure du Forth ; et quoique vieux, je le vis alors s’armer, et je l’entendis se réjouir, dans l’espoir (pour me servir de ses propres expressions) de « tirer encore une fois sa claymore[1] avant de mourir. » En effet, à cette époque mémorable où la capitale de l’Écosse fut menacée par trois misérables chaloupes ou bricks, à peine en état de piller un village habité par des pêcheurs, Invernahyle fut le seul homme qui proposa un plan de résistance. Il offrit aux magistrats, si l’on pouvait se procurer des poignards et des sabres, de trouver, dans les plus basses classes, autant de Highlanders qu’il en faudrait pour tailler en pièces l’équipage de tout bateau qui viendrait s’engager dans une ville remplie de rues étroites et tortueuses, où les disperserait probablement l’ardeur du pillage. Je ne sais si son plan fut goûté ; je crois plutôt qu’il parut trop hasardeux aux autorités constituées, qui ne pouvaient, même à cette époque, désirer voir des armes aux mains des Highlanders. Un vent d’ouest violent et continu décida la question, en chassant hors du détroit Paul Jones et ses vaisseaux.

S’il y a quelque chose d’humiliant dans ce souvenir, on éprouve quelque plaisir en le comparant à ceux de la dernière guerre, lorsque Édimbourg, outre les forces régulières et la milice, fournit volontairement une brigade de cavalerie, d’infanterie et d’artillerie, s’élevant à plus de six mille hommes, qui se trouva prête à repousser une force beaucoup plus considérable que celle dont l’aventureux Américain était le chef. Le temps et les circonstances changent le caractère des nations et le sort des cités ; et ce n’est pas sans quelque orgueil qu’un Écossais doit penser que le caractère mâle et indépendant d’un pays (qui confie sa défense aux bras de ses enfants), après avoir été obscurci durant un demi-siècle, a pu, durant le cours de sa vie, recouvrer tout son lustre.

  1. Espèce d’épée large dont se servaient les montagnards écossais. a. m.