Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que si elles nous sont rendues, nous nous retirerons sans régler nos comptes avec eux ; sinon, que nous brûlerons la maison, et tous ceux qui s’y trouvent seront massacrés. » Il répéta plus d’une fois cette menace, avec une agréable variété des imprécations les plus horribles que put lui suggérer sa barbare fureur.

" Et quel est votre lieutenant ? demanda mon père. — Le gentleman qui monte un cheval gris, dit le drôle, et qui a un mouchoir rouge noué autour de la tête. — Faites-nous donc le plaisir de dire à ce gentleman que, si lui et les misérables qui sont avec lui ne se retirent de devant la maison à l’instant même, je ferai feu sur eux sans cérémonie. » À ces mots mon père ferma la fenêtre et rompit la conférence.

« L’ambassadeur n’eut pas plus tôt rejoint ses camarades, qu’en poussant un bruyant houra, ou plutôt un hurlement sauvage, ils firent une décharge contre la maison. Les vitres des fenêtres furent toutes brisées, mais les précautions que j’ai décrites plus haut protégèrent nos gens : personne ne fut atteint. Trois décharges semblables eurent lieu, sans qu’on y ripostât par un seul coup de fusil. Mon père remarquant alors qu’ils prenaient des haches et des leviers, probablement pour enfoncer la porte, s’écria d’une voix forte : « Que personne ne tire, excepté Hazlewood et moi. Hazlewood, visez le parlementaire. » Lui-même ajusta l’homme au cheval gris, qui tomba sous le coup. Hazlewood ne fut pas moins adroit. Il renversa à terre le parlementaire qui était descendu de cheval et s’avançait une hache à la main. Leur chute découragea le reste de la bande : ils coururent à leurs chevaux ; et quelques coups de fusil lâchés sur eux les mirent en fuite : ils emportèrent avec eux leurs compagnons tués ou blessés. Nous ne pûmes reconnaître s’ils avaient fait quelque autre perte. Un moment après leur départ, nous vîmes arriver une troupe de soldats, à mon grand contentement. Cantonnés à quelques milles de là, ils s’étaient mis en marche au premier bruit du combat. Quelques-uns accompagnèrent les douaniers et leur capture jusqu’à un port de mer dans le voisinage, pour les y mettre en sûreté, et les autres, à ma très instante prière, restèrent avec nous ce jour-là et le lendemain, afin de mettre la maison à l’abri de la vengeance de ces bandits.

« Telle fut, ma très chère Mathilde, ma première alarme. Je ne dois pas oublier de vous dire que ces misérables laissèrent dans une chaumière, sur le bord de la grande route, l’homme dont le visage