Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/244

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avait été pris dans un combat… Il le lui donna pour en faire un domestique… Que je l’aie laissé échapper !… Le maudit bâtard, il se serait fait pendre, que je m’en inquiéterais peu. — Bien, bien ! Il a donc été élevé comme un domestique ? — Non, non. Le vaurien gagna le cœur du vieillard, qui lui donna son nom, l’éleva dans son comptoir, et l’envoya aux Indes. Je crois qu’il voulait ensuite le faire passer en ce pays-ci ; mais son cousin lui a donné à entendre que le commerce de la contrebande serait perdu pour longtemps, si le jeune garçon revenait en Écosse. — Croyez-vous qu’il connaisse maintenant son origine ? — Comment diable ! répliqua Hatteraick, vous dirais-je ce qu’il connaît maintenant ? mais il s’en est souvenu pendant bien long-temps. Il n’avait encore que dix ans quand il persuada à un autre enfant de Satan, un bâtard anglais comme lui, de s’emparer de la chaloupe de mon lougre pour revenir dans son pays, comme il disait… Malédiction ! avant qu’on pût les rattraper, ils étaient hors du canal, à la hauteur de Deurloo… la chaloupe aurait pu chavirer. — Plût à Dieu qu’elle eût chaviré pendant qu’il y était ! s’écria involontairement Glossin. — J’étais si furieux contre lui, que je le fis sauter par dessus le bord… mais bah ! le méchant petit diable nageait comme un canard ; je le laissai donc nager un bon mille pour lui apprendre à vivre… Mais, par saint Nicolas ! prenez garde à vous, maintenant qu’il est plus haut qu’un baril de harengs ; car il n’était pas plus haut que cela, qu’il avait déjà la vivacité de l’éclair, et l’impétuosité du tonnerre. — Mais comment est-il revenu des Indes ? — Et comment le saurais-je ? La maison de là-bas a sombré, ce qui nous a donné une terrible secousse à Middlebourg. C’est pour cela qu’ils m’ont envoyé ici pour voir ce qu’on pourrait faire avec mes vieilles connaissances… car nous croyions que les anciennes histoires étaient oubliées, bien oubliées. Je n’étais pas revenu les mains vides de mes deux précédents voyages. Mais Brown, ce stupide chien, a été donner contre l’écueil, en se faisant tuer par le colonel. — N’étiez-vous donc pas avec eux ? — Non, saprédié… Je ne crains rien… mais l’expédition était trop avant dans les terres, et on aurait pu me donner la chasse. — C’est vrai. Mais pour revenir à cet enfant… — Oui, oui. Tonnerres et éclairs ! c’est là votre affaire à vous. — Comment savez-vous qu’il est réellement dans ce pays ? — Parbleu, Gabriel l’a vu dans les montagnes. — Gabriel ! qui est ce Gabriel ? — Un petit Bohémien qui, il y a dix-huit ans environ, fut enlevé par la presse, et mis à bord du sloop de