Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que du temps de l’indépendance galwégienne, un certain Hanlon Mac-Dingawaie, frère du prince régnant, Knarth Mac-Dingawaie, avait assassiné son frère et son souverain pour enlever le trône à son neveu encore enfant ; poursuivi par la vengeance des fidèles alliés et des serviteurs de la famille royale qui avaient épousé la cause de l’héritier légitime, Hanlon avait été contraint, avec quelques complices de son crime, à se réfugier dans cette tour imprenable, et il s’y défendit jusqu’à ce qu’il fût réduit par la famine ; alors, mettant le feu à la place, lui et les compagnons qui lui restaient s’entre-tuèrent de désespoir, plutôt que de tomber entre les mains de leurs implacables ennemis. Dans le récit de cet événement, qui remontait à une époque de barbarie, il pouvait bien y avoir quelque vérité ; on mêla à cette histoire des contes de diables et de sorciers, de sorte que la plupart des paysans du voisinage aimaient mieux faire un long détour que de passer de nuit auprès de ce lieu formidable. Quant aux lumières qu’on voyait souvent briller dans ces ruines lorsqu’elles servaient de rendez-vous à des vagabonds ou à des brigands, ces contes absurdes servaient à les expliquer d’une manière favorable à leurs projets et satisfaisante pour le public.

Maintenant il faut avouer que notre ami Sampson, quoique bon littérateur et savant mathématicien, n’était pas encore assez philosophe pour mettre en doute la réalité des sortilèges et des apparitions. Né dans un temps où douter de l’existence des sorcières était s’exposer au soupçon de participer à leurs pratiques infernales, Dominie avait adopté ces contes ridicules comme un article de foi fondamental ; et peut-être eût-il été aussi difficile d’ébranler sa croyance sur le premier point que sur le second. Imbu de pareils préjugés, et remarquant que le jour inclinait vers sa fin, Dominie ne put se trouver si près de la tour de Derncleugh sans ressentir une secrète horreur.

Quelle fut donc sa surprise, lorsqu’en passant devant la porte cette porte que l’on supposait avoir été placée par un des derniers lairds d’Ellangovvan pour empêcher d’audacieux étrangers de s’exposer aux périls qu’on pouvait courir sous ces voûtes habitées par des esprits.. cette porte qu’on croyait toujours fermée, et dont la clef était, dit-on, déposée au presbytère cette porte enfin s’ouvrit tout-à-coup, et offrit à ses yeux épouvantés la figure de Meg Merrilies : il la reconnut à l’instant même, quoiqu’il ne l’eût pas vue depuis bon nombre d’années. Elle se plaça droit devant lui