Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/392

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indépendante, et devenir assez puissant pour étendre la main vers les vieux et infortunés serviteurs de notre famille, que la mort de notre père… — Vous avez raison, ma chère Lucy, répondit le jeune héritier d’Ellangowan ; et j’espère avec l’assistance du ciel, qui nous a jusqu’à présent si bien conduits, avec le secours de ces bons amis, que la générosité de leur cœur intéresse en ma faveur ; j’espère que mes tristes aventures pourront bien avoir cette heureuse issue. Mais je ne puis regarder sans émotion ces vieilles tours à demi ruinées. Si le perfide coquin qui en est maintenant possesseur a l’audace d’en déplacer une seule pierre… »

Il fut interrompu par Dinmont, qui s’avançait vers eux à grands pas, et qu’ils n’aperçurent qu’au moment où il était près de les joindre. « Capitaine, capitaine, on vous demande ! celle que vous savez bien vous demande ! »

Au même instant, Meg Merrilies, comme si elle fût sortie de dessous terre, se présenta devant eux. » Je vous ai cherché à la maison ; je n’ai trouvé que lui (montrant Dinmont) : mais vous avez raison, et c’est moi qui ai tort. C’est ici que je devais vous rencontrer, en ce lieu même où mes yeux virent votre père pour la dernière fois. Rappelez-vous votre promesse, et suivez-moi. »



CHAPITRE LIII.

LA TRAHISON.


La dame perdait sa peine à parler au roi d’une façon bienséante ; le roi Arthur, absorbé par son chagrin, ne lui répondait pas. Quel homme es-tu ? lui demanda la dame ; pourquoi ne veux-tu pas me répondre ? Je puis soulager ta peine, quoique je te semble laide.
Le Mariage de sir Gauvain.


La belle fiancée de sir Gawain, tant que dura le charme jeté sur elle par sa méchante belle-mère, était probablement plus décrépite et, comme on dit communément, plus hideuse que Meg Merrilies ; mais je doute qu’elle possédât cet enthousiasme sauvage qu’une imagination exaltée communiquait aux traits singuliers et fortement caractérisés, ainsi qu’à tous les mouvements de cette femme, qui, eu égard à son sexe, pouvait paraître gigantesque. Aussi les chevaliers de la table ronde n’éprouvèrent pas une plus grande terreur, lorsqu’elle leur apparut entre un chêne et un buisson de