Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/46

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chement le résultat qu’il avait trouvé, et de lui faire connaître en même temps la futilité des règles de l’art d’après lesquelles il avait opéré : c’est dans cette résolution qu’il sortit pour se promener sur la terrasse.

Si la vue des environs d’Ellangowan lui avait paru magnifique au clair de la lune, elle ne perdait rien de sa beauté aux rayons d’un soleil du matin ; et quoiqu’on fût au mois de novembre, la terre même souriait à son influence. Une montée rapide mais régulière conduisit Mannering de la terrasse sur une éminence voisine et en face du vieux château. Il consistait en deux tours rondes, massives, sombres et obscures, en saillie aux deux angles extrêmes d’une courtine, ou mur simple qui les unissait, et protégeait ainsi la principale entrée, qui donnait sous une voûte élevée au centre de la courtine dans la cour intérieure du château. Les armoiries de la famille, sculptées dans la pierre de taille, se voyaient sur la grande porte, et le portique montrait les espaces arrangés par l’architecte pour baisser la herse et lever le pont-levis. Une grande porte de ferme, grossièrement faite de planches de jeunes sapins clouées ensemble, formait la seule défense de cette entrée autrefois formidable. L’esplanade devant le château commandait un beau point de vue.

L’horrible route et la scène de désolation que Mannering avait traversées le soir précédent, étaient dérobées à sa vue par quelques monticules ; le paysage présentait une charmante alternative de collines et de vallées, traversées par une rivière qu’on apercevait en quelques endroits et cachée dans d’autres où elle roulait ses eaux entre deux rivages escarpés et couverts de bois. Le clocher d’une église et l’apparence de quelques maisons indiquaient la situation d’un village, à l’endroit où elle se jetait dans l’Océan. Les vallons paraissaient bien cultivés, les enclos qui les partageaient bordaient les pieds des collines, et les haies-vives qui les entouraient montaient quelquefois sur la pente. Au delà étaient de verts pâturages, couverts surtout par des troupeaux d’un bétail noir, puis le marché public du pays dont la vue à quelque distance animait encore le paysage. Les collines plus éloignées avaient un aspect plus sévère, et à une plus grande distance encore elles devenaient des montagnes couvertes d’une sombre bruyère, offrant à l’horizon une barrière qui formait les limites naturelles et fixes de la contrée cultivée, et faisait concevoir en même temps l’idée charmante que c’était un lieu solitaire et retiré. Le rivage de la mer,