Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La congrégation se composait encore de quelques soldats, les uns en corselet et le casque d’acier sur la tête ; les autres en justaucorps de buffle ; d’autres enfin en habits rouges. Ces hommes de guerre portaient en bandoulière des munitions, et s’appuyaient sur leurs hallebardes ou leurs mousquets. Eux aussi avaient leur doctrine particulière sur les points les plus épineux de la religion, et joignaient l’enthousiasme le plus extravagant au courage le plus déterminé sur un champ de bataille. Les bourgeois de Woodstock regardaient ces saints militaires avec crainte et respect ; car bien qu’ils ne se fussent pas souvent souillés par des actes de pillage et de cruauté, cependant il ne dépendait que d’eux d’en commettre, et les citoyens pacifiques n’avaient d’autre alternative que de se soumettre à tout ce qu’avait suggéré à leurs guides militaires une imagination enthousiaste et déréglée.

Après s’être fait attendre pendant quelque temps, M. Holdenough s’avança à travers les ailes de la chapelle, non avec cette démarche lente et majestueuse avec laquelle le docteur Rochecliffe avait coutume de rehausser la dignité du surplis, mais d’un pas précipité, comme quelqu’un qui arrive trop tard à un rendez-vous, et qui se hâte pour se faire attendre le moins possible. C’était un homme grand et maigre, au teint hâlé, dont l’œil vif indiquait un caractère assez irascible. Son habit n’était pas noir, mais d’une couleur brune ; et par dessus ses autres vêtements, il portait en l’honneur de Calvin un manteau de Genève, de couleur bleue, qui tombait de dessus ses épaules, pendant qu’il se hâtait d’arriver à la chaire. Ses cheveux étaient coupés aussi ras que possible, et couverts d’une calotte de soie noire, si bien collée à sa tête, que les deux oreilles sortaient de chaque côté comme deux anses à l’aide desquelles on aurait pu enlever toute la personne. Le digne ministre n’en portait pas moins une longue barbe grise et pointue ; il avait des lunettes, et tenait à la main une petite bible de poche avec un fermoir d’argent. Arrivé à la chaire, il s’arrêta un moment pour respirer, et ensuite monta les marches deux à deux.

Mais il fut arrêté par une main vigoureuse qui saisit son manteau : c’était celle d’un soldat qui s’était détaché de la petite troupe stationnée dans l’église. Il était robuste, de taille moyenne, l’œil brillant, et d’une physionomie qui, bien qu’elle n eût rien d’extraordinaire, attirait néanmoins l’attention. Son costume, quoique pas entièrement militaire, l’était en partie. Il portait un large pantalon