Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/39

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profession que Rob-Roy, dirigeait alors ses opérations, mais comme percepteur au nom du gouvernement, ou, selon l’expression écossaise, comme receveur de la rente noire. La nature de cette contribution a été expliquée dans le roman de Waverley et dans les notes de cet ouvrage. On peut citer ici l’explication qu’en donne M. Graham de Gartmore :

« La confusion et le désordre du pays étaient si grands, le gouvernement s’en occupait si peu, que les gens modérés étaient contraints d’acheter la tranquille possession de leurs biens par les infâmes et ignominieuses contributions de la rente noire. Une personne qui entretenait une correspondance suivie avec les brigands préservait du pillage, d’après une convention et pour une somme annuellement payée, les terres ainsi taxées. Ce revenu servait à payer une moitié des brigands pour ramener les bestiaux volés, et l’autre moitié pour les dérober, afin de rendre nécessaire le maintien de la rente noire. Les domaines de ceux qui refusent de payer ou de favoriser ce hideux commerce sont rançonnés par la partie pillarde des gens de ce guet, qui veulent ainsi les forcer à acheter leur protection. Leur chef s’intitule capitaine du guet, et ses bandits prennent ce nom qui leur donne une espèce d’autorité pour traverser le pays, ce qui les met à même de commettre tous les brigandages. Ces bandes, dispersées dans les montagnes, forment un corps considérable d’hommes endurcis dès leur enfance aux plus grandes fatigues, et capables dans l’occasion de faire l’office de soldats.

« Des gens ignorants et enthousiastes qui vivent dans une dépendance absolue de leur chef ou seigneur, dont les consciences sont dirigées par des prêtres catholiques ou des ecclésiastiques insermentés, qui enfin ne possèdent rien, sont propres à prendre le rôle qu’on veut leur donner. Ils ne craignent pas le danger, parce qu’ils n’ont rien à perdre ; on peut donc sans peine les décider à tout entreprendre. Rien ne peut rendre leur condition pire. Les temps de confusion et de trouble leur permettent de s’abandonner à des licences qui améliorent quelque peu leur sort[1]. »

Comme l’usage d’exiger la rente noire encourageait ouvertement le brigandage et entravait beaucoup la marche de la justice, un arrêt, 1567, chap. xxi, déclara coupable de crime capital et celui qui levait et celui qui payait cette taxe. Mais la nécessité de

  1. Lettres sur le nord de l’Écosse, vol. 11, p. 314-5.