Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/16

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Évremond, étoit le cri des libraires, à la fin du dix-septième siècle, comme ils dirent plus tard : Faites-nous des Lettres persanes. Puis, tout à coup, cette célébrité s’est éteinte. Depuis 1753, date de la dernière publication de ses Œuvres complètes, si souvent reproduites à la fin du dix-septième siècle et au commencement du dix-huitième, l’attention refroidie ne s’est plus reportée que fugitivement sur un si important personnage. Voltaire a donné le signal du retour de l’opinion. Laharpe, enchérissant sur la malveillance dissimulée du maître, a fort maltraité Saint-Évremond. Lémontey n’a vu en lui qu’un homme de cour, qui daignoit faire des vers détestables ; et, de nos jours, un homme de beaucoup d’esprit a pu écrire qu’on ne s’expliquoit pas, à la lecture des ouvrages de cet écrivain, la renommée qui l’avoit entouré de son vivant.

Si l’enthousiasme de son siècle a été exagéré, l’oubli de la postérité ne seroit pas moins injuste. En ce temps, où le dix-septième siècle est l’objet de plus de curiosité, de plus d’intérêt, de plus de sympathie que jamais ; où l’histoire des hommes d’État, des philosophes, des poëtes, des grands écrivains, des femmes illustres de cette époque mémorable, est approfondie avec l’ardeur savante qu’un autre âge avoit consacrée à l’étude de l’antiquité grecque et romaine ; il semble que les œuvres et la personne de Saint-Évremond doivent trouver une heure de justice et de faveur. L’influence qu’il a exercée sur ses contemporains, le rang qu’il a tenu dans le monde et dans les lettres ; une disgrâce foudroyante, telle qu’on n’en voit que sous les gouvernements absolus, et qui dévoua sa vie à