Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/48

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GODEAU.

Attendant nos Messieurs, que nous faudra-t-il faire ?

COLLETET.

Je suis prêt d’obéir à votre volonté.

GODEAU.

Parlons comme autrefois, avecque liberté.
Vous savez, Colletet, à quel point je vous aime !

COLLETET.

Seigneur, votre amitié m’est un honneur extrême.

GODEAU.

Oh bien ! seul avec vous ainsi que je me voi,
Je vais prendre le temps de vous parler de moi.
Avez-vous lu mes vers ?

COLLETET.

Avez-vous lu mes vers ?Vos vers ! Je les adore ;
Je les ai lus cent fois, et je les lis encore :
Tout en est excellent, tout est beau, tout est net,
Exact et régulier, châtié tout-à-fait.

GODEAU.

Manqué-je, en quelque endroit, à garder la césure ?
Y peut-on remarquer une seule hiature :
Suis-je pas scrupuleux à bien choisir les mots ?
Ne fais-je pas parler chacun fort à propos ?
Le Decorum latin, en françois Bienséance,
N’est si bien observé nulle part, que je pense.
Colletet, je me loue, il le faut avouer ;
Mais c’est fort justement que je me puis louer.

COLLETET.

Vous êtes de ceux-là qui peuvent, dans la vie,
Mépriser tous les traits de la plus noire envie :
Vous n’aviez pas besoin de votre dignité,
Pour vous mettre à couvert de la malignité.