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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

— Vis en sécurité, me dit le prince, après m’avoir considéré quelques instants ; j’accueille volontiers les étrangers, pourvu qu’ils ne tentent pas d’altérer la loi et les coutumes de nos pères.

Et il me promit, en me congédiant, de donner des ordres pour faire protéger notre caravane dès qu’elle serait sur son territoire.

Je fus d’autant plus satisfait de cette première visite au prince, qu’il avait résolu, à ce qu’il paraît, de ne plus permettre à aucun Européen de séjourner dans le Tigraïe. L’officier allemand et le naturaliste ne tardèrent pas, en effet, à recevoir l’ordre de quitter le pays ; à force d’instances, ce dernier obtint un sursis ; il abjura ensuite le protestantisme, pour adopter la croyance eutychienne, et il vit encore dans le pays, où il s’est marié.

— Je laissai le Père Sapeto à Adwa, et en trois jours, j’arrivai à Halaïe, où je fus rejoint par mon frère.

Le transport des marchandises et bagages se fait à dos de chameau dans le pays bas et plat qui s’étend depuis Moussawa jusqu’au pied du plateau où est situé Halaïe ; à partir de ce point, l’escarpement des rampes rendant les services du chameau impossibles, on emploie des porteurs ou des bœufs. Dans le Tigraïe et dans tout le haut pays les transports se font à dos d’homme, à dos de mule ou à dos d’âne, et l’usage du chameau est inconnu. Nous n’avançâmes désormais qu’en relevant la route à la boussole ; mon frère se chargeait de ce soin durant la matinée, et moi pendant l’après-midi ; celui qui faisait ce travail suivait la caravane à pied. Nous ne pouvions aller qu’à petites journées, car nos porteurs souffraient de la chaleur : la saison d’hiver régnait à Moussawa, mais depuis Halaïe, nous étions en plein