Page:About - Le Roi des montagnes.djvu/58

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l’abreuvoir, et nous arriverons plus vite à pied. »

Mary-Ann décida sa mère. Elle mourait d’envie de voir le bon vieillard et ses troupeaux ailés. Dimitri fixa les chevaux auprès de la fontaine, en posant sur chaque bride une grosse pierre pesante. Mme  Simons et sa fille relevèrent leurs amazones ; et notre petite troupe s’engagea dans un sentier escarpé, fort agréable assurément aux chèvres de Castia. Tous les lézards verts qui s’y chauffaient au soleil se retirèrent discrètement à notre approche, mais chacun d’eux arracha un cri d’aigle à la bonne Mme  Simons, qui ne pouvait pas souffrir les bêtes rampantes. Après un quart d’heure de vocalises, elle eut enfin la joie de voir une maison ouverte et un visage humain. C’était la ferme et le bon vieillard.

La ferme était un petit édifice en briques rouges coiffé de cinq coupoles, ni plus ni moins qu’une mosquée de village. À la voir de loin, elle ne manquait pas d’une certaine élégance. Propre en dehors, sale en dedans, c’est la devise de l’Orient. On voyait aux environs, à l’abri d’un monticule hérissé de thym, une centaine de ruches en paille, posées à terre sans façon et alignées au cordeau comme les tentes dans un camp. Le roi de cet empire, le bon vieillard, était un petit jeune homme de vingt-cinq ans, rond et guilleret. Tous les moines grecs sont décorés du titre honorifique de bon vieillard, et l’âge n’y fait rien. Il était vêtu comme un paysan, mais son bonnet, au lieu d’être rouge, était noir : c’est à ce signe que Dimitri le reconnut.

Le petit homme, en nous voyant accourir, levait les bras au ciel, et donnait les signes d’une stupéfaction profonde. « Voilà un singulier ori-