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inaperçues, voilées aujourd’hui devant nous, ou même voilées pour toujours, un monde infini de possibilités, monde des rapports inconnus d’action, des formes jamais observées, des états du sentiment jamais éprouvés ; mais la seule supposition de ces choses possibles, leur donne une certaine valeur positive de l’existence, comme d’une chose représentée, pressentie, et par conséquent, objet de notre pensée ; seulement, cet objet est ici d’une nature purement psychique. — De même, les faits les plus réels, le moins soumis à la critique et aux suppositions, comme la douleur, par exemple, puisent toute leur force d’existence dans la propriété qu’ils ont d’être un objet de notre pensée ; une douleur qui ne serait aucunement perçue, qu’on ne pourrait nulle part localiser, ni même en penser d’une manière générale qu’elle est, n’existerait point en tant que phénomène psychique, en tant que notre sensation ; la lumière solaire serait tout à fait anéantie, disparaissant dans la région négative de l’inconnaissable, si elle ne pouvait être perçue comme impression réelle, ni représentée comme un phénomène qui fut ou qui peut advenir, ni conclue comme une cause ou un effet, nécessaire ou possible, des faits observés, c’est-à-dire, si sous aucun aspect elle ne devenait le générateur de notre pensée.

L’attribut de « l’existence » est donc équivalent à la possibilité de devenir l’objet de la pensée. Quelque chose est positivement — comme fait de la vie en général — c’est-à-dire qu’elle est une possibilité de la pensée. Ce sont deux notions tout à fait adéquates, se substituant entièrement l’une à l’autre, dont le contenu est identique. — Si nous admettons les existences métaphysiques, les choses en soi, existant indépendamment de notre pensée (comme la matière, ou les Idées de Platon), alors nous pouvons dire, qu’entre nous et tout être existant en dehors de nous s’interpose toujours la pensée, l’unique pont qui nous réunit à la chose en soi, et que, par conséquent, tout être ne peut se manifester à nous comme tel que quand il devient l’objet de la pensée, c’est-à-dire, que dans la possibilité de la pensée est impliquée sa valeur positive, la valeur du fait qui peut entrer dans notre expérience, devenir un moment de la vie, une particule de notre monde. — La possibilité de la pensée c’est donc le principe du phénomène. — Ce principe ne préjuge d’aucune théorie métaphysique, et conserve son universelle valeur aussi bien envers le matérialisme, qu’envers l’idéalisme ; car, il n’est que l’expérience exprimée in abstracto, la propriété inséparable de tous les faits concrets sans exception. Si même nous supposons que les atomes