Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/146

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– Ne vas-tu pas te fâcher, à présent ?

– Je me livre… N’est-ce point assez ?

– C’est trop, morbleu ! Puisque tu avais assez du métier de soldat il fallait rester déserteur ! Que diable veux-tu que je dise à M. d’Assonville, mon frère, quand il saura que je t’ai fait casser la tête ?

Au nom de M. d’Assonville, Belle-Rose étouffa un soupir.

– Ah ! tu soupires ! reprit M. de Nancrais qui allait de long en large par la chambre, masquant sous l’apparence de la colère l’intérêt qu’il portait à Belle-Rose ; M. de Villebrais, que tu avais fort mal accommodé, dit-on, est un méchant homme, je le sais ; mais enfin, c’est ton officier !… Encore si tu étais allé te faire massacrer ailleurs, je m’en serais lavé les mains…

– Monsieur le vicomte, dit Belle-Rose en tâchant d’affermir sa voix altérée, il en sera ce que Dieu voudra ; mais permettez-moi de laisser là ce sujet de conversation. J’ai d’autres devoirs à remplir.

– D’autres devoirs ! Es-tu fou ? Tu n’en as pas d’autres que d’aller en prison.

– J’irai tout à l’heure ; mais veuillez me dire, je vous prie, si vous n’avez pas un pli de M. d’Assonville à me remettre ?

– Parbleu ! je l’avais oublié. Le voici… Si mon frère te charge de quelque commission, il choisit bien son temps… Il est à Paris maintenant, j’imagine ; l’as-tu vu ? comment se porte-t-il ?

À cette question, Belle-Rose pâlit.

– M’entends-tu ? reprit M. de Nancrais… Oh ! si tu ne veux pas parler, ajouta-t-il en voyant l’hésitation de Belle-Rose, garde ton secret. Mon frère a toujours été l’homme du monde le plus mystérieux que j’aie connu ; il a un tas d’affaires obscures auxquelles je n’ai jamais rien compris… Si ce sont les tiennes aussi… faites-les ensemble.

– Hélas ! M. d’Assonville n’en aura plus ! dit Belle-Rose tristement.