Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/190

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– Eh ! il s’en est fallu d’une étincelle que je ne partisse avant lui !

– Avant ?

– Oui, mais l’étincelle a fait long feu.

– Que Dieu la bénisse ! Et M. de Nancrais ?

– Il n’est pas si mort que tu pensais.

– Vous avez donc vu M. le duc ?

– Je lui ai parlé : c’est un excellent militaire, prompt à la réplique, ferme, décidé, capable de tuer un homme comme un chasseur une alouette, mais au fond doux comme une demoiselle.

– C’est-à-dire qu’on est sûr de tout obtenir à la fin quand il ne vous fait pas sauter la tête au commencement.

– Justement ; tiens, prends ce louis et va boire à sa santé.

– Je vais me griser, lieutenant.

Le lendemain, au point du jour, un officier de la maison du général vint prévenir Belle-Rose qu’il était attendu dans la grande chambre du conseil. Belle-Rose revêtit l’uniforme et partit. Quand il entra dans la salle, le cœur battit à coups redoublés dans sa poitrine. M. le duc de Luxembourg, entouré d’un brillant état-major, était assis dans un grand fauteuil ; parmi les grands officiers de sa suite, plusieurs portaient par-dessus l’habit le cordon des ordres de Sa Majesté.

M. de Luxembourg salua Belle-Rose de la main et lui indiqua une place située de manière à bien voir tout ce qui allait se passer. Sur un signe du général, tout le monde s’assit dans un profond silence, un officier sortit, et un instant après, les portes, ouvertes à deux battants, livrèrent passage à M. de Nancrais, qui entra suivi de deux grenadiers. M. de Nancrais aperçut Belle-Rose, tous deux échangèrent un sourire, l’un d’adieu, l’autre d’espérance ; puis le capitaine s’inclina devant le conseil et attendit. M. de Luxembourg ôta son chapeau à plumes blanches et se leva.