Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/201

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Le duc de Castel-Rodrigo prit une plume sur la table, écrivit quelques mots et remit le papier au lieutenant.

– Voici l’ordre, monsieur ; maintenant répondez ; mais songez-y : aussi bien j’ai consenti à faire ce que vous m’avez demandé, aussi bien je vous ferais pendre si vous me trompiez.

– Alors je n’ai rien à craindre ; parlez.

– Le roi Louis XIV est-il arrivé à Charleroi ?

– Il arrivera demain au camp.

– A-t-il le projet de quitter les bords de la Sambre et de pousser en avant ?

– On croit que l’armée abandonnera son campement et envahira les pays espagnols, qu’elle a l’ordre de conquérir.

– Nous avons là les places de Douai, de Mons, de Tournai, de Maubeuge, du Quesnoy.

– Ces places tiendront trois jours et seront prises.

– Monsieur, fit le duc, oubliez-vous que vous parlez au gouverneur de la province ?

– Je n’oublie rien ; vous m’interrogez, je réponds.

– Si vous croyez si fort au succès des armes françaises, qu’êtes-vous donc venu chercher parmi nous ?

– Je vous l’ai dit : la vengeance.

– C’est bien, monsieur, retirez-vous ; quand j’aurai besoin de vos services, vous serez prévenu.

Quand ils furent sortis, M. de Villebrais se tourna vers l’officier qui l’accompagnait.

– Avez-vous, monsieur, lui dit-il, dans quelque régiment de l’armée, de ces hommes qui ne reculent devant aucune entreprise et savent tout risquer dans l’espoir d’un gain honnête ?

– Nous avons malheureusement trop de ces hommes-là. Vous cherchez des soldats, vous trouverez des bandits.

– Voudriez-vous, monsieur, me conduire au quartier de ces gens-là ?

– C’est ici, derrière ce bouquet de frênes. Ils servent dans le corps de M. le duc d’Ascot.