Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/231

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gentilhomme qu’elle avait rencontré dans l’antichambre de M. de Louvois. Elle courut à lui.

– Monsieur, lui dit-elle d’une voix brève, me reconnaissez-vous ?

– Madame la duchesse de Châteaufort ! s’écria Cornélius en s’inclinant.

– Eh bien, monsieur, en ce moment on assassine Belle-Rose.

À ce cri, le vieux Guillaume s’élança vers la duchesse.

– Que dites-vous ! madame ? s’écria-t-il ; je suis son père !

– Je dis qu’il faut le sauver s’il est vivant ou le venger s’il est mort. C’est à Morlanwels qu’il faut courir ; à cheval, à cheval, et qu’on me suive !

La duchesse prit un pistolet à la ceinture de Grippard, sauta sur sa jument, lâcha les rênes et partit suivie de ses deux laquais. Cornélius, Guillaume, Pierre et Grippard s’élancèrent sur des chevaux de dragons qui étaient par là, et la petite troupe, excitée par son guide, franchit les barrières du camp.

Cependant Belle-Rose et la Déroute suivaient le Lorrain, qui pressait sa monture sans souffler le moindre mot. Au bout d’une lieue, Conrad prit un sentier sur la gauche qui coupait à travers champs. L’approche de la guerre avait fait décamper les habitants ; les fermes étaient dévastées ; on ne voyait pas un paysan alentour.

– Où diable nous mènes-tu ? dit la Déroute, à qui la mine du Lorrain ne revenait pas.

– C’est une entrevue où il faut de la prudence. La personne qui m’envoie serait désespérée si l’on venait à la soupçonner, répondit Conrad.

La Déroute se tut, mais il s’assura que ses pistolets jouaient bien dans leurs fontes. Ceux que Conrad cachait dans ses poches étaient tout armés. On courut encore une demi-lieue sans découvrir personne. Belle-Rose, absorbé par ses pensées, se recueillait en quelque sorte pour la mission qu’il allait accomplir. Le chemin que suivaient