Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/272

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Grinedal que vous avez vu à Malzonvilliers, le frère de Claudine, a été arrêté et conduit à la Bastille… On dit qu’un danger le menace.

– Que pouvons-nous pour lui ?

– On dit que je puis tout, continua Suzanne à qui les larmes revenaient aux yeux ; on m’a demandé d’en informer Sa Majesté, et que c’était un sûr moyen d’obtenir la grâce de Belle-Rose.

– Pourquoi n’êtes-vous point partie ?

– Oh ! monsieur ! vous êtes mon mari, et vous souffrez ! Le pouvais-je ?

– Vous êtes une honnête et digne femme, murmura M. d’Albergotti en posant sa main sur le front incliné de Suzanne ; me pardonnerez-vous un jour de vous avoir ravi le bonheur qui vous était dû ?

Suzanne releva ses paupières gonflées de pleurs et regarda son mari avec une touchante expression de reconnaissance.

– Pourquoi me parlez-vous ainsi ? dit-elle ; n’avez-vous pas été plein de tendresse pour moi et ne m’avez-vous pas aimée et protégée ?

M. d’Albergotti sourit tristement.

– J’étais près de la maison de Guillaume de Grinedal, un soir qu’un jeune homme se mourait de désespoir entre deux jeunes femmes qui pleuraient. L’une avait le costume d’une villageoise, l’autre portait le voile de mariée.

À ces mots, Suzanne effarée tomba sur ses genoux, elle cacha son visage dans les plis du drap.

– Pardonnez-moi, mon Dieu ! pardonnez-moi ! dit-elle d’une voix brisée par les sanglots.

– Et qu’ai-je à vous pardonner, pauvre femme ? Oui, j’ai bien souffert ce soir-là… Si votre main était à moi, votre cœur était à un autre !… Mais ne vous êtes-vous pas dévouée à consoler ma vieillesse ? ne vous ai-je pas toujours trouvée près de moi, tendre, affectueuse et charitable ?… Si j’ai souffert, c’est parce que je vous